Il y a trois ans, Bpifrance lançait son plan climat avec la Banque des Territoires. Objectif : aider les entreprises à mener à bien leur transition environnementale. Un sujet sur lequel les PME sont sensibles mais qu’elles ne savent pas toujours par quel bout le prendre. Éric Versey, directeur exécutif en charge du Financement et du Réseau au sein de la banque et pilote du plan, en dresse un bilan d'étape.
En 2020, Bpifrance présentait un plan climat. Comment s’articule-t-il ?
Ce plan a été officiellement annoncé en pleine période Covid, à un moment où les acteurs économiques se sont un peu plus réveillés sur le climat. Il repose sur trois grands piliers. Le premier consiste à trouver des substituts aux énergies fossiles en mettant le paquet sur le financement et l’émergence d’énergies renouvelables. Nos financements en la matière tournent autour de 1,5 milliard d’euros par an. Notre objectif ? Atteindre les 3 milliards d'ici 2028 avec une montée en puissance annuelle. Deuxième axe: pour accompagner la décarbonation des PME, il convient de leur trouver des solutions et d’y injecter de l’innovation. Nous devons faire émerger des greentech, en allant chercher les technologies dans les laboratoires et les universités afin d’aider les chercheurs à monter des projets et à créer des start-up. Notre troisième axe, le plus ambitieux : accompagner la transition environnementale de toutes les PME-ETI.
Où en êtes-vous dans l'exécution du plan ?
Depuis 2020 nous avons accompagné 5 000 entreprises et injecté 15 milliards d’euros, tous produits confondus. Nous espérons passer à 20 000 entreprises de toutes tailles et de tous secteurs dans les cinq ans qui viennent pour 35 milliards d’euros de ressources allouées. Nous avons les moyens financiers et humains de nos ambitions. L’enjeu consiste à aller trouver l’innovation et à sensibiliser les PME, mais aussi leurs financeurs sans lesquels nous ne pourrons pas être à la hauteur des défis de demain.
Comment les convaincre ?
Les financeurs ont besoin d’être accompagnés car les projets s’avèrent parfois risqués. Les banquiers n’ont pas tous le même niveau d’information. Certains découvrent tout un monde avec sa complexité, d’autant plus que les enjeux ne sont pas les mêmes d’un secteur à un autre. Nous disposons de la boîte à outils nécessaire pour les accompagner. Je pense, par exemple, au fonds de garantie vert qui couvre les prêts de transition à hauteur de 80 %. Nous pouvons aussi apporter toute une gamme de réponses aux différentes questions qu’eux et leurs clients se posent.
"Bpifrance a les moyens financiers et humains de ses ambitions"
Les PME ont-elles évolué sur le climat ?
Oui. Quand on parle aux dirigeants d’entreprise, nous n’avons plus à leur faire prendre conscience de la nécessité d'évoluer. Mais le porte-à-porte reste nécessaire car les patrons n’ont pas toujours le temps, la ressource et les connaissances pour savoir comment mener un projet de transition. Certains font des petits pas mais ce ne sera pas suffisant. Il faut changer les business models. Nous proposons aux PME de faire leur bilan carbone, de les mettre en relation avec un bureau d’études – dont une partie du coût est subventionnée – pour élaborer leur plan stratégique afin qu’elles atteignent leurs objectifs. Nous pouvons aussi leur présenter des dirigeants qui ont déjà avancé sur le sujet pour partager de bonnes pratiques.
Les entreprises ont-elles un avantage financier à se lancer dans de tels changements ?
Si la transition peut être vécue par les entrepreneurs comme une contrainte car elle a un coût qui n’apporte pas toujours un retour sur investissement rapide, elle est aussi source d’opportunités. Elle rassemble les équipes, permet de gagner de nouveaux clients et les dirigeants sont fiers de travailler sur cette thématique. Nous avons par exemple un outil, le Diag Eco-flux, à travers lequel nous mettons à disposition du chef d’entreprise un expert pendant 12 jours homme pour l’aider à comprendre l’origine de ses flux (gaz, eau, déchet, etc.) et à mettre en place si besoin des palliatifs. Son retour sur investissement est généralement assez rapide : en moyenne 40 000 euros dès la première année.
Propos recueillis par Olivia Vignaud