En 1979, Pierre et Christiane Riou créent Riou Glass. Depuis, l’ETI normande, spécialisée dans la conception de solutions et produits verriers intelligents, a été reprise par leur fille qui officie en tant que présidente et leur fils, administrateur.

Décideurs. Vos parents ont créé Riou Glass quand vous aviez trois ans. Comment s’est articulée votre histoire personnelle avec celle de l’entreprise ?

Christine Riou Feron. L’histoire de l’entreprise est une aventure familiale. Quand des entrepreneurs démarrent un projet, tout se passe un peu dans la cuisine. Les premiers collaborateurs venaient prendre le café à la maison. Nos parents travaillaient ensemble. Ils parlaient tout le temps de Riou Glass et nous passions nos vacances scolaires sur les sites, que mon père appelait ses résidences secondaires. À l’adolescence quand j’en avais assez, je disais que je ne viendrais jamais travailler dans l’entreprise. J’ai eu une expérience professionnelle en dehors de Riou Glass, dans une société américaine et celle-ci m’a bien servie. Je suis ensuite entrée par la petite porte pour bien comprendre les métiers, puis j’ai commencé à rencontrer nos clients. J’ai aussi poursuivi la formation Objectif manager chez Neoma afin de trouver de la légitimité. En réalité, j’avais surtout besoin de me prouver que j’étais à ma place. En 2022, vous avez organisé une cérémonie durant laquelle votre père vous a transmis les clés de l’entreprise.

Était-ce un symbole important ?

C’était un moment important et structurant. L’idée est venue du fonds que nous avions fait rentrer à notre capital pour accompagner notre croissance et la transmission de l’entreprise. Mon père n’était pas très à l’aise avec le principe, probablement car après il n’y avait pas de retour en arrière possible. Mais l’idée a fait son chemin. Nous avons construit ensemble ce moment nécessaire qui a permis à toutes nos parties prenantes de savoir que dorénavant c’était moi qui étais aux commandes.

Votre père a-t-il vraiment quitté l’entreprise ?

Oui, mais cela ne l’empêche pas de passer de temps en temps. Toutefois, de la même manière que le repreneur doit porter un projet, le cédant doit également en avoir un. Quand on est un véritable entrepreneur, on ne peut pas s’arrêter du jour au lendemain. Mon père a créé une entreprise qui propose des articles funéraires en verre et une activité de transformation du verre dans l’océan Indien.

J'ai formalisé la stratégie en écrivant le premier plan de Riou Glass

Quelles décisions importantes avez-vous prises depuis votre nomination ?

Assez rapidement, j’ai souhaité donner une nouvelle dynamique à l’entreprise. Nous participions pour la première fois au salon Batimat à Paris et il fallait investir dans un stand de 100 mètres carrés. C’était l’occasion de repenser l’identité visuelle et j’avais envie d’inscrire ma patte. Cela n’a pas été simple pour mon père car je touchais à quelque chose qu’il avait luimême dessiné. J’ai aussi formalisé la stratégie en écrivant le premier plan de Riou Glass. Auparavant, les décisions se prenaient au fil de l’eau. L’entreprise est plus grande qu’à ses débuts et les collaborateurs ont davantage besoin de sens. Nous nous sommes développés à l’international : en Belgique, Espagne, Italie et ne comptons pas nous arrêter là. J’ai également lancé une grande enquête collaborateurs afin d’être au plus près de leurs attentes et notre académie pour leurs formations est sortie de terre. En outre, nous avons mené une campagne d’actionnariat salarié. Tous nos salariés français ont reçu gratuitement des parts de l’entreprise et 54 % ont souhaité y investir. Je voulais que chacun puisse être propriétaire de son outil de travail, en prendre soin et le transmettre, comme le fait la famille.

Comment percevez-vous votre rôle ?

Je suis garante de l’histoire et des valeurs de l’entreprise. Dès qu’un sujet touche à son ADN, je veux être autour de la table. Je participe toujours aux journées d’accueil des nouveaux collaborateurs. Je suis aussi garante de l’argent de la famille, qui doit être mis au service de l’entreprise et de ses collaborateurs à bon escient.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

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