L’infertilité touche une personne sur six dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé. Des facteurs environnementaux, les modes de vie mais aussi le recul de l’âge de la maternité sont notamment pointés du doigt. Des stratégies thérapeutiques et des solutions technologiques se mettent en place pour y remédier.
Avant toute chose, il est important de rappeler que l’infertilité concerne autant les hommes que les femmes. Ainsi, en France, la concentration de spermatozoïdes a reculé d’environ 32 % entre 1989 et 2005, selon un article du CNRS de 2021. Les troubles ovulatoires, les pathologies ovariennes et les cas d’endométrioses sévères sont en augmentation. Dans la majorité des cas, ces troubles de la fertilité conduisent à recourir aux techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP), dont la fécondation in vitro la plus courante et l’insémination artificielle. Pourtant, "même si nous disposons de biologistes et techniciens de la procréation exceptionnels, cette assistance médicale ne se traduit que par 36 % de naissances à l’arrivée", soulignait le docteur Charlotte Methorst, urologue spécialiste des troubles de la sexualité et de la fertilité lors de la présentation du rapport du congrès français d’urologie en novembre 2023 consacré à la fertilité masculine.
Quand l’innovation fait des petits
De nombreuses start-up, notamment en France et en Europe, se mobilisent pour apporter des solutions innovantes. ImVitro mise sur l’intelligence artificielle. La chercheuse Alexandra Boussommier Calleja, sa fondatrice, déploie un algorithme pour mieux sélectionner les embryons en culture à l’aide d’un score de probabilité de grossesse, et ainsi optimiser les taux de réussite des fécondations in vitro, technique la plus courante de PMA. Son modèle économique ? La commercialisation de licences pour utiliser sa solution en mode SaaS (Software as a Service).
"Même si nous disposons de biologistes et techniciens de la procréation exceptionnels, cette assistance médicale ne se traduit que par 36 % de naissances à l’arrivée"
Autre exemple, Endodiag créée par Cécile Real, ingénieure biomédicale qui a mis au point avec ses équipes un test sanguin non invasif pour dépister une endométriose, souvent détectée à l’occasion d’un bilan de fertilité. D’après une publication d’avril 2021 du groupe de travail du réseau de soins endométriose de l’AP-HP, "la part de l’endométriose dans la population des femmes infertiles […] varie de 20 à 68 % selon les études".
La start-up suisse Ava s’inscrit dans cette même veine de solutions permettant de favoriser une grossesse. Son bracelet connecté suit en temps réel différents paramètres physiologiques féminins pour déterminer les 5 jours d’un cycle menstruel les plus propices à la procréation. Citons aussi la start-up britannique Apricity créée en 2019 par Caroline Noublanche et qui se présente comme la première clinique virtuelle de fertilité au monde. Les patients peuvent utiliser un chatbot pour obtenir des informations personnalisées en temps réel sur leur traitement, minimisant ainsi l'anxiété souvent associée à un parcours d’AMP complexe. L’Espagne n’est pas en reste. La start-up Overture Life automatise la procédure d'embryon in vitro, grâce à un appareil capable de sélectionner les spermatozoïdes les plus aptes à féconder un ovule et de les injecter dans l'ovule. Une technique qui aurait l’avantage d’optimiser les chances de succès d’une FIV mais aussi d’en réduire les coûts. Elle serait aussi adaptée à l’infertilité masculine, où la quantité ou la qualité des spermatozoïdes sont insuffisantes pour obtenir une fécondation par les techniques conventionnelles de FIV.
À ce titre, mentionnons l’intérêt des traitements de stimulation de la spermatogénèse. Ils améliorent les résultats du spermogramme et permettent de réduire les FIV au profit d’une fécondation intra-utérine. Autant d’innovations qui alimentent un marché mondial de l'infertilité en pleine croissance. Évalué par Grand View Research à 16,7 milliards de dollars en 2020, il devrait croître d'environ 6 % par an jusqu'en 2027.
Pierre Derrouch