Sur fond de mouvement social contre la réforme des retraites, le Sénat vient d’adopter un nouveau dispositif : le CDI senior. Contre l’avis du gouvernement, l’amendement a été voté par 202 voix contre 123.  Destiné aux plus de 60 ans, il est censé favoriser l’emploi des seniors au chômage.

 

Les groupes LR et centristes du Sénat ont adopté le lundi 6 mars un amendement créant un CDI de "fin de carrière". Ce nouveau contrat, avec exonération de cotisations famille pour l’employeur, devra être négocié en amont et validé par chaque branche professionnelle. 

Le gouvernement embarrassé 

Ce dispositif permettra aux employeurs de bénéficier d’une exonération de cotisations familiales moyennant l’engagement de garder les salariés jusqu’à ce qu’ils puissent partir à la retraite à taux plein. Le ministre du Travail Olivier Dussopt donne un « avis défavorable » à cet amendement dont il pressent l’effet d’aubaine pour certaines entreprises.  Du côté des LR, on défend l’idée que cela favorisera l’embauche des personnes de plus de 60 ans, ce qui permettrait à l’État de faire une économie de plus de 1 milliard d’euros100 000 CDI étant signés chaque année pour des salariés de plus de 60 ans. Toutefois les services du ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal estiment à 800 millions d’euros par an la mise en place d’un tel dispositif. Il précise également que "si toutes les personnes qui sont actuellement en emploi en CDI, qui ont plus de 60 ans, [sont] basculées en “CDI senior” par leur employeur, cela coûte 2,3 milliards d’euros".

Un CDI de trop ?

Si les chiffres évoqués concernant ce nouveau contrat ne sont pas encore précis, le sénateur socialiste Hussein Bourgi pointe du doigt un autre effet possiblement dommageable de cet amendement : créer un « contrat au rabais » pour les seniors. Il compare ce contrat à celui du CPE. La tendance serait-elle de déguiser des contrats précaires sous le nom de CDI ? Philippe Martinez ironise sur France Info : "Aujourd’hui, on invente des CDI pour tout."

Un complément de l’index senior 

Dans la nuit de dimanche 5 mars au lundi 6 mars, le Sénat a également adopté la mise en place d’un index senior que devront adopter les entreprises de plus de 300 salariés à compter de juillet 2024. Le seuil de plus de 50 salariés, ajouté le mois dernier par l’Assemblée nationale, en revanche a été rejeté. Toutefois, cet indice reste perçu pour beaucoup comme une "mesurette" qui ne permettra que de cartographier la place des seniors en entreprise. Face à un taux d’emploi des 60-64 ans en dessous de la moyenne européenne, ni l’index senior ni le CDI "de fin de carrière" ne semblent satisfaisants. Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force ouvrière,appelle pour sa part à la création d’un "droit à la reconversion professionnelle spécifique" à destination des seniors.

Perçu pour certains comme une commande expresse du Medef, cet amendement est toutefois souhaité par différents partenaires sociaux. Mesurettes ou réelles avancées, les entreprises sont sommées de réfléchir à la place que celles-ci accordent aux seniors et de rattraper leur retard en la matière.

Elsa Guérin

 

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