Le financement de l’innovation est un sujet clef qui conditionne les avancées dans le domaine de la santé. Avec ses 1500 employés et ses cinq sites industriels, Medtronic est un des acteurs du changement qui s’emploie activement à trouver des solutions répondant aux besoins des patients et des professionnels de santé. Rencontre avec la présidente de Medtronic France, Florence Dupré.

Décideurs. Quelle est l’ADN de Medtronic et quel rôle jouez-vous en matière d’innovation ?  

Florence Dupré. En arrivant chez Medtronic, j’ai découvert que la cocréation est dans l’ADN du groupe et qu’elle y joue un rôle vraiment puissant. Notre démarche est de collaborer au quotidien avec les acteurs de la santé. Qu’il s’agisse des institutions, des professionnels de santé, des associations de patients, des start-up ou de nos équipes. L’essence même de notre entreprise est d’identifier les besoins de santé non-couverts et de développer, avec les acteurs de notre écosystème, les solutions innovantes en santé de demain.  

La technologie, l’organisation des soins et les modes de financement dans ce domaine sont nos trois principaux axes de développement. En plus de cela, nous avons donné deux coups d’accélérateur pour que Medtronic s’inscrive comme une société apprenante, agile et tournée vers l’avenir : d’abord en matière d’innovation numérique, le second en termes d’intelligence collective. Le tout se traduit par de nouvelles idées et des axes de recherche dans de nombreux domaines. Nous portons et participons aussi aux projets de nombreuses start-up, qui sont pour nous des acteurs incontournables de l’industrie de la santé de demain.  

La France est régulièrement pointée du doigt pour ses difficultés à investir et à financer l’innovation. Selon vous, l’innovation médicale est-elle en retard en France ?  

La France est-elle une terre d’innovation ? Oui, je le pense sincèrement. Nous avons la chance de recenser sur notre territoire des personnes passionnées, des start-up, des médecins engagés et proactifs. En revanche, l’innovation peut-elle se développer à une vitesse suffisante pour les patients ? Non, malheureusement ! Et lorsqu’on aborde la question de son financement, c’est là que le bât blesse. 

Les mesures annoncées par le gouvernement lors du CSIS [Conseil stratégique des industries de santé, Ndlr] et prochainement mises en place sont encourageantes. Les instances politiques ont conscience que la France n’est pas assez compétitive et prennent le sujet au sérieux. Il y a un vrai travail de fond à déployer avec les autorités pour améliorer le processus de création de solutions de santé et notamment une approche plus prospective des besoins de santé. Et ce, afin d’envisager ces innovations comme un investissement pour le bien public, dont chaque patient serait acteur.  

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                                                           Les laboratoires de Medtronic 

Pouvez-vous nous expliquer comment s’est mobilisé Medtronic pendant la crise sanitaire liée au Covid-19 ? 

Nous nous sommes mobilisés de manière exceptionnelle ! La priorité était de protéger nos salariés. Nous avons immédiatement mis en place le télétravail pour nos équipes. La continuité de notre production de dispositifs médicaux a été assurée et la production de nos respirateurs a été multipliée par cinq pour répondre aux besoins croissants et urgents des établissements de santé.  

Nous nous sommes aussi interrogés sur les innovations qui pourraient être utiles pour traverser cette crise. Au début de l’épidémie, les professionnels ne pouvaient pas entrer librement dans les chambres des patients atteints du Covid, nous avons ainsi mis au point un système de paramétrage des respirateurs à distance pour faciliter le quotidien des soignants.  

Enfin, pour n’en citer qu’une, notre collaboration avec la start-up WeCare@Work nous a permis, dans une période déstabilisante et anxiogène, d’élaborer tout un parcours de conseil, de formation et de relaxation pour éviter le stress et le sentiment d’oppression liés au confinement et à la pandémie pour nos salariés.

 « La crise sanitaire a prouvé que le secteur de la santé est d’une agilité incroyable ! » 

La pandémie a fait émerger de nouvelles problématiques et de nouveaux besoins. Quels sont d’après-vous les enjeux dans le domaine de la santé ? 

L’explosion du numérique, de la data et de toutes les nouvelles possibilités pour monitorer les patients à distance sont des enjeux fondamentaux pour les prochaines années. Ces évolutions vont permettre de transformer les établissements de santé et leur fonctionnement de manière significative. Modifier le parcours de soins, augmenter l’ambulatoire quand cela est possible, pour améliorer l’efficacité des établissements et des soignants peuvent être des solutions. La crise sanitaire a prouvé que le secteur de la santé est d’une agilité incroyable ! Il faut conserver cette agilité et la nourrir par des innovations. Il y a là une énorme carte à jouer pour transformer le domaine de la santé en France !  

Quels sont les projets marquants pour Medtronic au cours de cette année 2021 ?  

Nous souhaitons approfondir les modes de travail digitaux qui ont été adoptés pendant la pandémie. Medtronic ne prévoie pas que ses employés reviennent intégralement en présentiel. Au contraire, pourquoi ne pas encourager le travail nomade, qui permet de travailler en région, chez soi, avec une qualité de vie qui permet plus de productivité, d’autonomie et donc de motivation ?  

Nous développons aussi de nombreuses innovations thérapeutiques sur lesquelles nos travaux se poursuivent. Ainsi, dans le domaine cardiovasculaire, nous avons mis au point une enveloppe antibactérienne absorbable – TYRXTM – conçue pour être utilisée avec les stimulateurs et les défibrillateurs cardiaques implantables et qui limite les risques d’infections après l’implantation d’un de ces dispositifs. Dans le domaine de l’hypertension artérielle, nos équipes réalisent actuellement des études sur la dénervation rénale comme nouveau moyen de traiter l’hypertension. Du côté des neurosciences, un système de stimulation cérébrale profonde – le Percept – a été développé. Celui-ci a la capacité de saisir et d’enregistrer en continu les signaux cérébraux des patients, tout en offrant un traitement à ceux qui sont atteints de troubles neurologiques liés à la maladie de Parkinson, au tremblement essentiel, à la dystonie ou à l’épilepsie. Quant au diabète, nous proposons désormais aux patients diabétiques de type 1 la toute première pompe à insuline qui embarque une intelligence artificielle et permet une gestion automatisée de l’insuline, se rapprochant ainsi toujours plus du fonctionnement d’un vrai pancréas.  

En fait, nos équipes travaillent sur tant de projets qu’il est presque frustrant de ne pas pouvoir tous les citer. Cette richesse est essentielle pour un acteur responsable et engagé, au service du bien commun qu’est la santé publique. 

Propos recueillis par Laura Breut