Lumière sur les entreprises partenaires des Jeux olympiques 2024. Décideurs Juridiques s’est entretenu avec Constance Popineau, directrice juridique au Comité national olympique et sportif français (CNOSF) qui est le représentant du Comité international olympique en France.

Décideurs Juridiques. C’est la première fois depuis cent ans que la France organise des Jeux olympiques (JO) d’été. Être un comité national des JO et le comité du pays hôte de l’événement, quelle différence ?

Constance Popineau. Appartenir au comité d’un pays hôte est une première pour nos équipes. La cohabitation avec un comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) est aussi une nouveauté. Depuis 2019, nombre de nos prérogatives lui ont été transférées : les marques olympiques, le marketing autour des anneaux et tous les partenariats. Elles nous reviendront au 1er janvier 2025, à la faveur d’un accord de marketing conjoint signé par le CNOSF en tant que ville hôte avec le comité international olympique (CIO). Sauf dans l’hypothèse d’une sélection de la France pour les JO d’hiver de 2030, dans laquelle le Cojop chargé de ces Jeux récupérerait ces compétences. Autre différence : l’organisation. Les autres comités nationaux olympiques et le CIO nous sollicitent beaucoup plus que sur des éditions classiques.

Le transfert de certaines prérogatives au Cojop a-t-il entraîné une décharge de travail pour le CNOSF ?

Le CNOSF assume la préparation des athlètes français aux Jeux et celle de la délégation française.  Cette délégation est élargie à l’ensemble des sports collectifs, qualifiés d’office pour les Jeux en raison de la qualité d’hôte de la France. Le transfert de compétences n’a donc pas diminué notre charge de travail. La différence, c’est que nous travaillons de concert avec le Cojop. Nous avons déjà expérimenté ce type de collaboration, à l’occasion des Jeux de Tokyo de 2021.

Quelles sont les dispositions mises en place pour garantir le respect de l’éthique sportive et la lutte contre le dopage pendant les Jeux olympiques ?

Nous innovons pour cette édition, notamment parce que nous travaillons pour la première fois avec l’équipe paralympique. Les athlètes de l’équipe de France olympique et paralympique bénéficient d’un programme de protection des athlètes contre toute forme d’abus. Déjà mis en place pour les mineurs, lors des JO de la jeunesse d’hiver de janvier-février 2024 ou encore des championnats mondiaux juniors, ce dispositif a été renforcé à l’égard des adultes pour Paris 2024. Il s’applique aux différents villages olympiques, au Club France – la plus grande fan zone des Jeux, située à La Villette dont le CNOSF à la charge de l’organisation.

“Cette année, le soutien aux athlètes paralympiques et olympiques constituait l’une des conditions du partenariat”

Il y a par ailleurs des règles liées aux jeux. En matière de dopage, chaque athlète doit effectuer un module de formation en ligne. Nous travaillons avec l’agence mondiale antidopage sur ces questions. Nous dispensons également des formations en e-learning, sur la lutte contre manipulation des compétitions et les paris, par exemple. Autre source de droit : la charte olympique. Son article 40 rappelle aux athlètes qu’ils doivent se concentrer sur leur performance olympique plutôt que sur leur partenaire et limite la promotion de leur sponsor pendant les jeux. [Ils ne peuvent indiquer que leur performance est en partie attribuable à un produit ou service du sponsor ou y apporter un soutien personnel, ndlr]. L’application de l’ensemble des règles olympiques incombe au CNOSF, ainsi qu’au Cojop.

Comment les partenariats se déroulent-ils ? Cette compétence désormais transférée au Cojop ne vous est pas étrangère.

On distingue les partenariats dits “tops” gérés par le CIO, sur lesquels le Cojop n’a pas la main, et les autres, les partenaires nationaux, dont il s’occupe. Les “tops” visent les partenaires présents sur plusieurs éditions. La BPCE est le partenaire le plus important de Paris 2024. Cette année, le soutien aux athlètes paralympiques et olympiques constituait l’une des conditions du partenariat. C’est une nouveauté des JO de Paris et un exemple pour les futurs jeux. Certains n’avaient pas attendu. La BPCE et la FDJ, par exemple, soutiennent depuis des années un pool d’athlètes.

Comment le comité envisage-t-il de résoudre les éventuels litiges qui pourraient survenir pendant ou après les Jeux olympiques Paris 2024 ?

Le CNOSF réglera les litiges sportifs à l’aide d’un tribunal arbitral du sport (TAS). Une chambre ad hoc sera créée pour les JO. Nous nous y préparons avec l’ensemble des fédérations. Cette justice particulière requiert la connaissance de la jurisprudence du tribunal et celles des différents règlements sportifs. C’est une justice très rapide. Les faits du matin sont jugés dans l’après-midi ou la soirée. Les autres litiges, liés aux spectateurs ou aux infrastructures par exemple, tombent dans l’escarcelle du COJOP. En revanche, toute infraction à la charte olympique relève du CIO qui délègue aux comités nationaux olympiques. Une commission disciplinaire de juristes et d’athlètes examinera le cas.

À quels types de litiges faites-vous face ?

C’est très varié : nage en eau libre à Rio, ski cross à Sotchi, boxe à Tokyo... Le dernier en date précédait l’ouverture des Jeux de Pékin. Une sportive jamaïcaine avait saisi le TAS pour pouvoir représenter son pays dans une épreuve de bobsleigh. Les enjeux portent parfois sur les sélections. Et après les JO, nous nous pencherons sur quelques cas d’ambush marketing [lorsqu’une marque tente d’associer ses produits ou services à un grand événement qui a déjà des entreprises-sponsors officiels, ndlr].

Comment avez-vous réagi aux perquisitions menées par le Parquet national financier au sein du Cojop en juin et octobre dernier dans le cadre des soupçons de prise illégale d’intérêts et de favoritisme ?

Le CNOSF n’a pas été visé. Ce type de révélations revient régulièrement aux différentes éditions des Jeux. Les jeux 2024 ont été l’occasion de mettre en place de nombreux garde-fous. La France a notamment instauré un comité d’éthique et un comité d’audit avec des membres issus de la Cour des comptes, de l’inspection générale des finances ou encore de l’agence française anticorruption. Le Cojop fait l’objet de bien plus de contrôles qu’une entreprise privée. Espérons que l’enquête n’aille pas plus loin.

Quels sont la discipline et le sportif que vous préférez ?

L’équitation, domaine dans lequel j’ai longtemps travaillé. J’apprécie Nicolas Touzaint, médaillé dès les JO d’Athènes en 2004, et Julien Épaillard. Chose rare, Nicolas Touzaint fait partie de l’équipe de France à chaque édition des Jeux. Aux jeux de Tokyo, j’ai eu la chance de rencontrer Léon Marchand. Je lui souhaite de belles performances à Paris. Ainsi qu’à Enzo Lefort en escrime.

Propos recueillis par Chloé Lassel

Photo : CNOSF-KMSP. Image : Anne-Laure Blouin

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