La banque coopérative a annoncé le 4 octobre opérer une levée de fonds de 30 millions d’euros afin de s’affranchir du Crédit Coopératif et devenir la première banque éthique et indépendante française. Déjà forte de ses 80 000 clients, dont 41 700 sociétaires, la Nef ambitionne de décupler son action pour une finance responsable.
Depuis 1988, la Nef garantit un circuit court de l’argent entre ses épargnants et ses emprunteurs. La coopérative citoyenne finance exclusivement des projets à impact positif, sans activité spéculative, et assure une transparence totale de ces financements. En obtenant l’agrément de la Banque de France, la Nef deviendrait alors la "nouvelle banque éthique indépendante" française. Pour que cette demande aboutisse, elle a besoin d’amorcer une forte augmentation de ses fonds propres et maintenir une collecte de capital dynamique ces prochaines années. C’est pourquoi les niveaux de collecte de capital nécessaires à son développement et à sa transformation d’agrément requièrent un niveau de mobilisation important dans les semaines à venir. L’objectif : développer son offre sans les freins inhérents au système d’adossement auquel elle est aujourd’hui contrainte. Elle disposerait ainsi d’une maîtrise complète de son activité́ et serait en mesure de proposer, par exemple, un compte et une carte de paiement aux particuliers. Une indépendance qui offrirait aussi aux Français une véritable alternative éthique, citoyenne, écologique aux banques traditionnelles.
Faire sauter la banque traditionnelle…
Une initiative importante, tant les déclarations d’engagements pour le climat des grandes banques françaises sont régulièrement épinglées, dans un contexte où leur responsabilité dans le réchauffement climatique est de plus en plus pointée du doigt. Dans ces derniers rapports publiés en 2021 et 2020, l’association Oxfam France alerte : l’empreinte carbone des grandes banques françaises représente près de 8 fois les émissions de gaz à effet de serre de la France entière et elles nous emmènent vers un réchauffement à +4°C d’ici à 2100, loin de l’objectif du +1,5°C recommandé par les scientifiques d’ici à 2050. Malgré leurs engagements, entre 2017 et 2020, pour un euro investi ou financé, les quatre plus grosses banques ont en moyenne augmenté de près de 2 % leurs émissions de gaz à effet de serre.
…et les néo-banques
Si de nouveaux acteurs émergent et promettent des alternatives "plus écologiques" à l’offre des banques traditionnelles, le Nef estime que ces "néo-banques" proposent des services de comptes et carte verts, mais ne sont ni des banques, ni des établissements de crédit. Elles n’ont ainsi aucune capacité à employer directement les fonds déposés par leurs clients. Le circuit de l’argent, au lieu d’être interne à l’établissement, passe par divers organismes financiers qui n’ont pas nécessairement d’engagement éthique ou écologique particulier. La promesse selon laquelle les banques, où sont finalement déposés les fonds, assurent que l’argent des usagers des néo-banques sera uniquement utilisé pour financer des projets écologiques serait ainsi loin d’être assurée.
New deal
Pour Bernard Horenbeek, Président du Directoire de la Nef, l’heure est venue pour un nouveau paradigme : "L’urgence climatique, la guerre aux portes de l’Europe et la crise sociale nous obligent plus que jamais à repenser notre société et à créer des outils financiers au service d’un monde plus respectueux des Hommes et de l’environnement. Depuis plus de trente ans, la Nef construit les bases de cette alternative. Aujourd’hui le moment est venu de donner à cet outil une place au cœur de la société française et d’offrir à chacun la possibilité d’y participer." Pour y parvenir, la Nef propose une offre bancaire éthique aux citoyens particuliers pour faciliter leur passage à l’action. Cette offre comprend des parts sociales (capital) pour soutenir directement le projet de banque éthique indépendante et le développement de l’activité crédit de la Nef (1€ investi en parts sociales permet à la Nef de prêter 10€ d’épargne à un projet à plus-value écologique, sociale ou culturelle) mais aussi un livret pour « décarboner son épargne » et une pré-inscription à un futur compte de paiement.
Et vous, à quoi sert votre épargne ?
Antoine Morlighem