La vie économique du secteur industriel est faite de cycles et obéit à de multiples réglementations. Pour les entreprises, s’y conformer ne s’improvise pas. Le cabinet de management de transition AXCEL Partners s’est confié pour mission de répondre à ce besoin d’accompagnement, en s’appuyant sur sa connaissance de l’industrie. Retour sur ce savoir-faire qui fait la différence avec Denis Azria et Frédéric Marot-Achillas, Managing Partners.
"L’enjeu est de positionner et superviser des managers de transition capables de redresser l’entreprise avant qu’il ne soit trop tard" (AXCEL Partners)
DÉCIDEURS. La spécificité d’AXCEL Partners est sa capacité à répondre aux besoins urgents des acteurs industriels en phase de restructuration ou de retournement. Pouvez-vous expliquer en quoi votre connaissance de l’industrie représente un atout ?
Denis Azria. Prenons l’exemple récent d’une entreprise qui fait une centaine de millions d’euros de chiffre d’affaires et qui est en phase de retournement. Au départ, cette entreprise nous avait sollicités sur une mission achat.
"Grâce à notre réseau de managers qualifiés, disponibles et issus de l’industrie, ainsi qu’à notre très bonne connaissance de ce secteur, nous avons pu régler les problèmes sous-jacents qui mettaient en péril la survie d’un client"
Nous avons vite mobilisé une manager experte, disposant d’une grande maîtrise des achats de segments, d’énergie, mais aussi des projets. Avec elle, nous avons identifié plusieurs causes de non-performance, allant au-delà des achats. Surtout, nous avons pu constater que les objectifs initiaux de notre mission, consistant à faire des économies, n’étaient pas adaptés à la situation. L’entreprise ne pouvait plus payer ses fournisseurs, ce qui rendait toute négociation de prix caduque. Nous aidons maintenant ce client à améliorer l’ensemble de ses opérations – projets, industrie, supply chain – et travaillons par ailleurs avec lui au redressement de sa situation financière. Cette mission nécessite également un changement profond de la culture managériale de l’entreprise.
En résumé, grâce à notre réseau de managers qualifiés, disponibles et issus de l’industrie, ainsi qu’à notre très bonne connaissance de ce secteur, nous avons pu régler les problèmes sous-jacents qui mettaient en péril la survie de ce client.
Frédéric Marot-Achillas. J’ajouterai un point sur ce savoir-faire qui est le nôtre : l’une de nos practices est consacrée à la restructuration, avec un associé qui est le garant de l’application du droit et qui connaît les cadres juridiques. Quand nous nous voyons confier une mission de restructuration, notre objectif est d’intervenir le plus tôt possible pour éviter le recours aux procédures collectives, c’est-à-dire à la sauvegarde judiciaire, au redressement voire à la liquidation. Les entreprises en difficulté font appel à nous pour notre savoir-faire en matière de retournement et de restructuration : il s’agit d’intervenir assez en amont pour éviter d’en arriver là. L’enjeu est de positionner et superviser des managers de transition capables de redresser l’entreprise avant qu’il ne soit trop tard.
Vous disposez de bureaux à l’étranger : cela vous aide-t-il, aussi bien pour répondre aux enjeux interculturels que pour maîtriser tous les aspects du droit dans ces contextes de crise ?
D. A. Cela aide sur plusieurs aspects. D’abord, cela nous sert à pouvoir accompagner nos clients dans les pays où nous sommes implantés, puisque nos associés sur place connaissent les viviers et les acteurs locaux. Certains des managers de notre vivier ayant de longues expériences de pays dans lesquels nous n’avons pas encore de bureaux, en étant originaires ou y étant installés, nous sommes capables d’intervenir partout dans le monde, par exemple au Moyen-Orient. Ces implantations géographiques constituent donc un bénéfice indéniable, pour nous comme pour nos clients.Sur le plan juridique, dépendamment des missions, il faut une connaissance du droit du travail et du droit commercial, qui gouvernent nos relations avec nos clients.
"Nous confions presque systématiquement les missions à des profils surqualifiés, afin de parer aux évolutions courantes de contexte et de garantir le résultat de notre intervention"
Pour les missions de restructuration, il est nécessaire de connaître le droit des procédures collectives – qui change d’un pays à l’autre –, et dans d’autres cas, le droit des exportations. Enfin, selon les pays et les types d’industries, le "National Eyes Only" peut s’appliquer, qui réserve aux seuls ressortissants locaux le droit d’accomplir une mission dans certains domaines spécifiques. Cela encore exige une très bonne implantation locale de notre part.
Pouvez-vous donner des exemples de restructurations auxquelles vous avez pu répondre de façon idéale, grâce à votre connaissance du pool de managers ?
F. M.-A. J’ai eu cette année un client au Canada dans le secteur de l’énergie, qui a soudainement dû remplacer un membre de son équipe à un poste de direction industrielle dans une région isolée. Me vient alors en tête le nom d’un manager vivant dans cette région – une gageure compte tenu de l’immensité du pays –, et dont le profil me semble particulièrement adapté. En 24 heures, le contact était établi et l’adéquation du manager avec les attentes du client était confirmée. La mission visait à améliorer les performances opérationnelles– notamment industrielles – de la société. Nous avons compris assez vite que notre client rencontrait des problématiques plus larges, qui nous ont amenés avec lui à rapidement repositionner ce manager à la direction générale de la société.
Ce manager avait donc les compétences pour être directeur général ?
F. M.-A. Nous confions presque systématiquement les missions à des profils surqualifiés, afin de parer aux évolutions de contexte, qui sont courantes, et de garantir le résultat de notre intervention.
Compte tenu de ce que vous exposez, comment expliquez-vous que des managers disposant de telles compétences ne soient pas en poste ?
D. A. Nombreux sont ceux qui, à partir de la cinquantaine, ont l’envie de travailler différemment, uniquement sur les sujets qui les intéressent, et afin de mieux gérer leur temps. Ce choix du freelancing peut être subi au départ : c’est l’âge où, pour certains, le plafond de verre est atteint, l’âge des remises en question personnelles pour d’autres. Mais une fois l’étape franchie, rares sont les managers de transition à vouloir revenir au salariat, même quand les employeurs leur font des offres. Néanmoins, je note que la fidélité des managers est plus forte quand les entreprises ont tendance à retenir les talents et n’en ont pas un usage utilitariste.
"Nous définissons et mettons en œuvre la feuille de route, ce qui explique que le management de transition fasse désormais totalement partie de l’écosystème des entreprises"
F. M.-A. Il y a aussi un aspect culturel à prendre en compte, qui est de l’ordre de la tendance. En Allemagne, le management de transition est quatre fois plus développé que chez nous. Avant, c’était six fois plus. La France rattrape peu à peu ce retard, ce qui répond à un mouvement de fond qui se dessine depuis des années et qui gagne certains pays du Sud de l’Europe : nous sommes désormais très présents en Italie, alors que le marché du management de transition n’existait pas là-bas il y a dix ans.
Aujourd’hui, les cycles économiques sont de plus en plus rapides, et exigent une adaptabilité très forte. Le management de transition permet de traverser ces différentes phases, d’aider une direction générale à passer un cap, et non uniquement à remplacer les collaborateurs. À chaque changement de cycle, les managers de transition accompagnent une direction générale sur un point précis de leur ligne de force : la réduction des coûts, la finance, le développement, la gestion, etc.
Une différence essentielle avec l’univers du conseil est que nous mettons en œuvre la feuille de route, ce qui explique que le management de transition fasse désormais totalement partie de l’écosystème des entreprises.
Percevez-vous, au travers des demandes que vous recevez, les tendances qui animent actuellement le secteur industriel ?
F. M.-A. J’observe que le management de transition est mobilisé sur davantage de thématiques, qui concernent plus de niveaux hiérarchiques. Auparavant, nous étions sollicités sur des sujets touchant les postes clé de DG ou de DAF, tandis qu’aujourd’hui nous pouvons intervenir sur d’autres couches hiérarchiques : contrôle de gestion, comptabilité, etc., tout en couvrant toutes les fonctions de l’entreprise – RH, supply chain, industrie… Cette tendance d’imprégnation à tous les niveaux de l’organigramme est notable. Pour autant, chez AXCEL, nous avons toujours une forte présence sur les projets à enjeux.
D. A. À mon échelle, en ce moment, j’officie principalement sur des missions de développement, de gestion de grands projets et d’augmentation de capacité industrielle. C’est une période positive, qui marque une reprise intéressante et représente de très belles missions.
Entretien avec Denis Azria, managing partner chez Axcel Partners et Frédéric Marot-Achillas, managing partner chez Axcel Partners