Avec l’ouverture de ses services bancaires au grand public en juin dernier et prochainement la création d’une offre d’assurance-vie, Green-Got s’avère être le meilleur lancement d'une néo-banque verte en Europe en 2022. Le projet ? mettre la finance au service de la transition climatique en réorientant les investissements vers des projets durables. Alors que l’impact du système financier mondial sur le changement climatique est à l’ordre du jour de la COP27, rencontre avec sa co-fondatrice, Maud Caillaux pour comprendre le rôle des banques dans cette transition.
Pourquoi le fléchage des dépôts et des crédits bancaires est-il primordial dans la lutte contre le réchauffement climatique ?
Aujourd’hui ce qui pollue le plus à l’échelle individuelle ce sont les dépôts d’argent à la banque. 4000 euros déposés dans une grande banque française, c’est plus de 2 tonnes de CO2 émises en votre nom, c’est-à-dire un Paris-New York en avion ou encore plus de 150 repas carnivores. Il existe un manque d’information et de culture financière : nous ne sommes pas au courant de la vie de l’argent et de ce qu’il permet de faire. C’est en partant de ce constat que nous avons lancé Green-Got en 2019.
En quoi Green-Got en tant que néo-banque verte se distingue-t-elle de l’offre bancaire traditionnelle ?
Green-Got est un outil puissant à l’échelle individuelle pour limiter le changement climatique et participer à la transition verte parce que les transactions servent à financer la transition écologique. Nous soutenons notamment trois projets à impact. Un en Amazonie pour lutter contre la déforestation à travers l’obtention de droits fonciers, l’autre aux côtés de l’ONG Wings of the Ocean pour dépolluer les océans et un dernier orienté 100% climat destiné à développer des énergies renouvelables dans des pays ou la production d’électricité est très carbonée. Nous visons un double impact, d’une part investir dans la transition et, d’autre part, encourager à la réduction de l’investissement dans les énergies fossiles en informant les populations sur le rôle du secteur bancaire dans cette transition écologique.
"Les banques ne sont pas climatosceptiques mais certaines entités décisionnaires ne sont pas encore assez convaincues de l’urgence de la situation"
Pourquoi les banques continuent-elles d’investir dans des projets d’énergies fossiles ?
Il y a des raisons historiques. Les grandes banques françaises ont pris leur essor pendant la révolution industrielle en réponse aux besoins de financement d’une industrie qui reposait à l’époque sur l’exploitation du charbon et du pétrole. Les banques ne sont pas climatosceptiques mais certaines entités décisionnaires ne sont pas encore assez convaincues de l’urgence de la situation. Enfin, réduire des engagements dans les énergies fossiles est un processus long, se décharger brutalement de tous ces actifs, c’est prendre un risque. Pourtant, aujourd’hui le paradigme a changé, et elles payent le prix du réchauffement climatique. A la suite des dernières inondations au Pakistan, par exemple, les entreprises sur place ont tout perdu et ne sont plus en mesure de rembourser un prêt, ce genre d'évènement peut mettre en faillite une banque.
Vous avez commencé avec une offre de compte bancaire pour particuliers, avez-vous pour projet de vous tourner vers l’investissement ?
Il est déjà possible de faire de l’investissement. Une offre d’assurance vie, le produit d’investissement préféré des Français, va être lancée avant la fin de l’année et 100% des fonds iront vers des entreprises qui cessent de financer les énergies fossiles. Nous allons aussi ouvrir nos offres à d’autres pays de la zone euro, la Belgique notamment. A terme, pour proposer une offre de crédit, il faudra obtenir la licence, ce qui est notre objectif, mais c’est un processus long et coûteux, nous devrons être plus nombreux dans la banque pour l’atteindre.
L’ambition est-elle de devenir la prochaine banque systémique ?
Notre logique est de constituer une plus grande communauté pour avoir davantage d’impact, mais si dans dix ans nous sommes la seule banque verte, nous serons tous perdants. La priorité est de limiter le changement climatique et d’embarquer les grandes entreprises et tout l’écosystème de financement vers ce projet.
Propos recueillis par Céline Toni