Dès 2006, Mathieu Grodner occupe plusieurs fonctions au sein de la marque de lingerie fondée par sa grand-mère, Simone Pérèle. En 2015, il devient directeur général de l’entreprise et lance un grand plan stratégique. De quoi insuffler une nouvelle dynamique. Pari réussi.

Décideurs. L’histoire de Simone Pérèle s’est écrite avec des duos de dirigeants familiaux. Racontez-nous.

Mathieu Grodner. C’est un hasard mais effectivement chaque génération a fonctionné en duo. Quand ma grand-mère a débuté en 1948, elle était corsetière et faisait du porte-à-porte afin de trouver des clients pour qui elle confectionnait des modèles sur commande. Très vite mon grand-père, Wolf Grodner, l’a rejointe. Elle était créative et savait ce que les femmes attendaient. Lui avait le sens des affaires et a su faire du talent de sa femme une success story. Leurs enfants – mon père Philippe et ma tante Catherine – ont repris progressivement les rênes dans les années 1980. À l’époque les enjeux de gouvernance et de transmission étaient réduits à leur plus simple expression. Il était normal que les enfants prennent la suite. Le duo a bien fonctionné et a su donner un nouvel élan à Simone Pérèle. Il a permis de professionnaliser l’entreprise, de l’adapter aux nouveautés marketing et commerciales et de la développer à l’international, où elle a fait dès lors 75 % de son chiffre d’affaires. Ce qui est toujours le cas aujourd’hui. En 2015 vous avez été nommé directeur général et votre cousine, Stéphanie Pérèle, directrice du pôle produits.

Comment le flambeau a-t-il été transmis ?

Dans les années 2000, l’entreprise continuait de faire partie des leaders de son secteur et d’être en bonne santé. Ce qui créait les conditions d’une nouvelle transmission. À la troisième génération nous sommes sept actionnaires frères, sœurs et cousins. Là encore, les choses se sont faites naturellement mais avec davantage d’organisation. La deuxième génération a eu l’intelligence de bien préparer le terrain. Nous avons été sensibilisés très tôt au rôle d’actionnaire et avons pu nous prononcer sur notre appétence ou non à intégrer l’entreprise. Nous avons signé un pacte d’actionnaires et rédigé une charte familiale de manière à structurer la gouvernance. Finalement, nous sommes deux à travailler dans l’entreprise mais tout le monde garde une affection pour Simone Pérèle.

"Quand mon père m’a laissé la direction, il a vraiment pris du recul"

Comment s’est déroulée la passation de pouvoir ?

Nous avons eu beaucoup de chance car chaque génération a joué le jeu au moment du passage de témoin. Il n’y a pas eu d’ambiguïté ni pour moi, ni pour les collaborateurs, ni pour les personnes extérieures. Quand mon père m’a laissé la direction, il a vraiment pris du recul. Il s’est préparé à ce moment qui n’est pas facile. Ce qui impliquait d’avoir d’autres projets. Pour ma part, avant d’être nommé DG j’ai eu du temps pour concevoir un plan stratégique global à cinq ans construit avec l’aide du board et des managers clés de l’entreprise. Lancer un cycle stratégique à ce moment-là permet de ne pas se focaliser sur la transmission familiale mais aussi sur les projets.

Quels étaient-ils ?

Nous avons digitalisé et retailisé le groupe. Pour devenir une marque forte, visible, plus désirable et se rapprocher de notre clientèle finale, il fallait vendre en magasin et non plus uniquement passer par des distributeurs. Aujourd’hui nos magasins représentent 60 % de notre business et notre base client est proche du million. Ce qui ne nous a pas empêchés de conserver notre savoir-faire industriel, construit par les générations précédentes.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

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