Derrière l’image positive dont jouit la RSE auprès des équipes se cachent des enjeux complexes, notamment en matière de conditions de travail dans les métiers de l’économie verte.

La Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) est perçue, dans l’opinion publique, comme un élément de plus en plus incontournable du développement durable des organisations.

Une perception très positive

Les Français perçoivent favorablement la RSE, malgré une relative méconnaissance sur le sujet. Selon une étude Ifop pour le forum de Giverny datée de septembre 2024, près de 87 % des répondants considèrent qu’il est important, voire déterminant, de former les élus des comités sociaux et économiques (CSE) aux enjeux environnementaux. Ce chiffre reflète à la fois une attente élevée envers les entreprises et une reconnaissance croissante de leur rôle dans la transition écologique. De plus, 77 % des sondés estiment que les entreprises devraient financer des projets environnementaux, y compris hors du cadre strict de leur activité directe.

Cette image positive est étroitement liée à l’idée que les entreprises, en adoptant des pratiques responsables, peuvent être un moteur déterminant de transformation écologique et sociale. La RSE apparaît alors comme un modèle de croissance vertueuse, un moyen de réconcilier développement économique, protection de l’environnement et bien-être des salariés.

Entre 2004 et 2016, les emplois liés à l’économie verte ont progressé de 36 % en France, contre seulement 5,2 % pour l’ensemble de l’économie

L’économie verte au cœur de la RSE

Le secteur de l’économie verte, en plein essor, a engendré la création de nombreux emplois, enregistrant entre 2004 et 2016 une hausse de 36 % en France, contre seulement 5,2 % pour l’ensemble de l’économie (source : Dares, juillet 2023). Cette dynamique nourrit l’enthousiasme pour un développement durable centré sur des activités économiques respectueuses de l’environnement.

Cependant, il faut prendre garde à ne pas idéaliser l’économie verte : en se focalisant sur ses possibles répercussions sociétales, le risque est d’occulter les réalités du secteur, parfois difficiles. Bien qu’essentielle, la transition vers une économie plus écologique n’est en effet pas exempte de défis, notamment en matière de conditions de travail.

66,93 % des travailleurs de l’économie verte sont exposés à au moins un facteur de pénibilité

La pénibilité : une réalité souvent ignorée

Alors que l’imaginaire collectif tend à concevoir les métiers de l’économie verte comme des emplois vertueux et porteurs d’avenir, les conditions de travail dans ce secteur s’avèrent parfois beaucoup plus ardues qu’attendu. Les données issues des enquêtes Sumer 2010 et 2017 révèlent que 66,93 % des travailleurs de l’économie verte sont exposés à au moins un facteur de pénibilité, un taux supérieur à la moyenne nationale (60,26 %). Une surexposition qui découle notamment de contraintes physiques fréquentes dans ce domaine : manutention de charges lourdes, postures pénibles ou encore vibrations mécaniques.

Les métiers liés à l’économie verte, bien que respectant des objectifs environnementaux aussi louables que nécessaires, confrontent souvent les travailleurs à des environnements professionnels difficiles. Par exemple, les salariés des secteurs de la gestion des déchets ou de la production d’énergie renouvelable sont souvent exposés à des risques physiques accrus, ainsi qu’à des nuisances sonores et thermiques.

Décalage entre perception et réalité de la RSE : comment concilier les deux ?

La question est alors de savoir comment faire des conditions de travail dans l’économie verte un sujet qui ne soit pas invisibilisé par la perception extrêmement favorable de la RSE. Si les entreprises sont largement vues comme des éléments clés de la transition écologique, il est nécessaire qu’elles intègrent les enjeux de santé et de sécurité au travail dans leur démarche et s’assurent que les travailleurs bénéficient d’un cadre de travail décent et sûr.

Les institutions internationales commencent à reconnaître cette contradiction. L’Organisation des Nations Unies pour l’environnement (UNEP), notamment, a souligné que les emplois créés dans le cadre de la transition écologique peuvent parfois renforcer les inégalités sociales ou aggraver les conditions de travail.

La pénibilité dans les métiers de l’économie verte, bien que souvent invisible, doit devenir une priorité dans les stratégies de RSE 

Un équilibre stratégique

Pour que la transition écologique soit véritablement inclusive et durable, elle ne peut se faire au détriment des travailleurs impliqués. Une prise de conscience pourrait ainsi encourager les entreprises à accentuer leur implication en matière de RSE. Cette approche pourrait se concrétiser par la mise en place de mesures spécifiques pour réduire la pénibilité, telles que systématiser les formations liées à la sécurité, investir dans des technologies réduisant les contraintes physiques, ou encore améliorer les conditions d’hygiène dans les environnements de travail pénibles.

En définitive, si la RSE continue de bénéficier d’une perception favorable, il est essentiel que l’État, les grandes entreprises, les collectivités territoriales, les citoyens, les PME et les ONG comprennent l'importance d’une transition écologique n’excluant pas le bien-être des travailleurs. La pénibilité des métiers de l’économie verte, bien que souvent invisible, doit devenir une priorité dans les stratégies de RSE, afin que ces métiers puissent à la fois protéger la planète et garantir des conditions de travail dignes.

Cem Algul

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