Le nombre de faillites n’a pas explosé, bien au contraire, depuis le début du confinement. Surprenante, l’information a été publiée aujourd’hui par Altares. Une nouvelle qui ne doit pas occulter la santé chancelante des TPE/PME du pays. Le pire est encore à venir et, faute d’un soutien suffisant de l’État, les défaillances pourraient se multiplier à la rentrée.

"La déferlante redoutée n'est donc pas encore là", explique Altares dans son dernier baromètre. Une nouvelle rassurante de prime abord. Toutefois, elle ne doit pas cacher un constat alarmant : les petites et moyennes entreprises subissent de plein fouet le confinement. Leur fragilisation pourrait rapidement dégénérer et provoquer, in fine, ce fameux tsunami de faillites.

Effet trompe-l’œil

Selon les chiffres publiés par le cabinet d’études, au cours de la première quinzaine d’avril, ce sont 649 redressements et liquidations judiciaires et 30 sauvegardes qui ont été ouverts par les tribunaux de commerce. Un traitement judiciaire rendu possible par la réouverture, après quinze jours de fermeture, des juridictions consulaires dont les audiences se tiennent dorénavant par visioconférence. Ces chiffres contrastent fortement avec ceux de l’année dernière. Au cours de la même période, en 2019, 2 738 procédures de toute nature avaient été déclarées. La situation pourrait donc sembler excellente si deux facteurs de taille ne venaient pas la mettre en perspective avec les spécificités de la conjoncture. Tout d’abord, la fermeture temporaire des tribunaux de commerce fausse ces chiffres, puisqu’elle a empêché les débiteurs de déclarer leurs difficultés. Ensuite, la réforme du droit des procédures collectives opérée fin mars permet aux entreprises de reporter la demande d’ouverture d’une procédure collective après le 24 juin.

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Les mesures d’aide jouent leur rôle amortisseur

Au-delà de ces chiffres, l’étude brosse un portrait préoccupant de la santé des TPE/PME dont l’état est jugé inquiétant et fragilisé, "en particulier pour celles qui étaient déjà en difficulté avant la crise". Si, pour l’instant, aucun secteur d’activité n’est particulièrement visé par une "surmortalité" par rapport à une période normale, les PME concentrent 12 % des défaillances enregistrées entre le 1er et le 15 avril 2020. Un taux largement supérieur à celui de 2019 constaté sur la période de référence qui atteignait alors 5 %. "La crise du Covid-19 a provoqué un changement de paradigme total pour tous les acteurs économiques", explique Thierry Million, directeur des études Altares. Pourtant, dans la tourmente, force est de constater que les mesures mises en place par l’État pour soutenir les entreprises remplissent leur mission et amortissent les difficultés immédiates induites par les fermetures imposées ou la baisse d’activité. L’absence de sursollicitation des tribunaux de commerce en témoigne. Mais combien de temps cela pourra-t-il durer ?

Les yeux rivés sur l’après

L’étude Altares pointe deux dates à surveiller pour jauger effectivement les conséquences du confinement et de la crise économique sur le nombre de défaillances. La première est celle du 24 juin, date à partir de laquelle toute entreprise en cessation de paiement sera tenue de se déclarer comme telle et donc devra solliciter l’ouverture d’une procédure collective. La seconde est le 24 août. En effet, "jusqu’à cette date, soit trois mois après la fin de l'état d'urgence, l'état de cessation des paiements de l'entreprise est apprécié au regard de sa situation financière constatée au 12 mars 2020 (date retenue comme celle du début de l'état d'urgence sanitaire). Cela veut dire que, jusqu’au 24 août, une entreprise pourrait ne pas être considérée en état de cessation de paiement si elle ne l’était pas au 12 mars". Plus globalement, il faudra mesurer les effets des plans d’aides et de relance que les pouvoirs publics et les acteurs privés ont mis ou mettront en œuvre. Les dégâts sont donc davantage attendus pour la rentrée. "La sortie de l’orage violent qui nous secoue tous doit pourtant se préparer maintenant", confirme Thierry Million.

Les bons résultats du début 2020 en matière de défaillances d’entreprises – les trois premiers mois de l’année avaient enregistré 6 000 défaillances de moins qu’au cours de la même période en 2019 – devraient rapidement être balayés. À moins que le gouvernement ne parvienne à prolonger suffisamment longtemps ses aides, transformant son plan de soutien en un véritable plan de relance.

Sybille Vié

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