Le 7 juin a été lancé un appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour dynamiser la construction d'immeubles en bois et la généraliser. Les villes, les collectivités mais aussi les aménageurs et les promoteurs sont invités à candidater.

« Le bois fait partie des solutions idoines pour la ville de demain. Il y a un renouveau de l’appétence pour  ce matériau qui coïncide avec les impératifs durables et écologiques actuels »,  a déclaré Luc Charmasson, vice-président du Comité stratégique Filière (CSF) au pavillon de l’Arsenal le 7 juin. De nombreux acteurs de l’ensemble du secteur étaient réunis à l’occasion du lancement de « Immeubles à vivre bois », l’appel à manifestation d'intérêt (AMI) soutenu par le gouvernement. Ce concours a pour vocation à dynamiser la construction d'immeubles en bois dans le logement mais aussi dans le secteur tertiaire et l'hôtellerie. Emmanuelle Cosse, ministre du Logement et de l’Habitat durable, et Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, étaient également présents. Les deux ministres ont souligné l’importance stratégique du développement de la filière. « Nous voulons que la question du bois soit au cœur de la politique du logement et de la construction. Ce concours national va lancer une dynamique », a insisté Emmanuelle Cosse, notant que la filière bois était aussi « celle de la durabilité ». Elle a rappelé que le bâtiment, encore très attaché au béton,  était  l'un des secteurs les plus consommateurs d'énergie. La généralisation de la construction bois peut ainsi vraiment changer la donne.  « Cet AMI doit marquer l’accélération du processus par tous les acteurs, constructeurs, promoteurs, architectes… Ce matériau fait partie des grands enjeux de la COP 21. Un mètre cube de bois c'est une tonne de carbone stockée ! », a aussi martelé Stéphane Le Foll. Le ministre a apporté des chiffres éloquents à l’appui. Alors qu'elle est de 15 % en Allemagne et 35 % en Scandinavie et aux États-Unis, la part bois dans les matériaux de construction stagne en France autour de 10 %. De plus, la balance commerciale de la filière bois française reste très déficitaire avec six milliards d'euros et une importation trop prononcée. Outre l'intérêt écologique du bois, les nouvelles constructions qui utiliseront du bois français pourront aussi relancer le secteur en amont.


Des démonstrateurs exemplaires

« Cela ne veut pas dire que les autres filières disparaîtront. Mais le XXIe siècle pourrait bien être celui du bois.  Administrations et politiques ont poussé le dossier », s’est félicité Franck Mathis, entrepreneur et président d’Adivbois, l’association pour le développement des immeubles à vivre en bois.  Celle-ci est chargée d’appuyer la mise en place de cet AMI qui est organisé par le Plan urbanisme construction architecture (Puca). Dans un premier temps, le but de l’appel est de construire des démonstrateurs, soit des immeubles de moyenne ou grande hauteur de dix étages au minimum. Ces réalisations auront vocation à constituer des références européennes. Les villes, les collectivités territoriales, les aménageurs et les propriétaires fonciers intéressés par le recours au bois dans la construction sont invités à proposer leurs terrains disponibles. « Les lauréats de l’AMI bénéficieront de l’ingénierie technique d’ADIVbois ainsi que du soutien des pouvoirs publics sur les aspects financiers et réglementaires », a expliqué Frank Mathis.
Après examen des dossiers, une dizaine de sites seront retenus fin septembre. En décembre seront ensuite sélectionnées les équipes qui réaliseront les premiers « Immeubles à vivre bois » démonstrateurs. La désignation des lauréats est prévue en juin 2017. La construction des immeubles pourrait débuter en 2018.
Tant pour les ministres que pour Adivbois, ce concours a aussi pour objectif de dépasser des appréhensions et démontrer que l’on peut dépasser les difficultés techniques. L’inventivité et l’innovation sont d’ailleurs notées comme critères importants.
 

Premiers intérêts

Plusieurs villes et collectivités ont déjà manifesté leur intérêt à l’instar de Saint-Étienne, Le Mans et la communauté urbaine de Strasbourg. La Ville de Paris devrait également faire partie du jeu. Jean-Louis Missika, adjoint à la maire de Paris, en charge de l’urbanisme, a par ailleurs fait remarquer qu’avec le végétal, le bois avait constitué une « tendance lourde » des projets proposés pour l’appel d’offre urbain innovant « Réinventer Paris ».  Nicolas Ferrand, directeur général de l’établissement public d’aménagement de Marne-la-Vallée, a également marqué son intérêt pour cet appel à manifestation. Il souhaite de manière générale faire de son territoire un site référent et pilote sur le bois. « L’ensemble des promoteurs ou constructeurs veulent travailler chez nous. Mais il y a encore des blocages, du côté des élus et des pompiers », a-t-il expliqué, en insistant sur la nécessité de renouveler la représentation du bois. Selon lui, celle-ci est encore trop associée à l’histoire des trois petits cochons… « Il y a la peur que la maison s’effondre et surtout l’idée que le bois ne peut être aussi pérenne que le béton ».  Son territoire a construit 500 logements en bois en 2015 et en prévoit  600 par an.
Dans la même logique que cet AMI, Nicolas Ferrand a évoqué Les Lodges , le programme résidentiel à Chanteloup-en-Brie, réalisé avec Bouygues Construction et lauréat d’une Pyramide d’argent en 2015. Il a aussi mentionné un projet en cours avec Vinci, une tour en bois de logements d’étudiants qui sera livrée en 2018 et dont le parking – également en bois –  préviendra les incendies.  « Les constructions de bois de grande hauteur sont un symbole fort dans la ville, elle sont des balises. Derrière une opération exemplaire, tout un sillon se déploie… », a glissé le sociologue et historien du bois Hugues Jacquet.
 

Laetitia Sellam

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