Derrière de nombreux dessins animés se cache un discret milliardaire israélo-américain passé par l’Égypte et la France. Retour sur la formidable ascension d’un petit vendeur de cactus.

Mars 2017, Hollywood Boulevard. Haïm Saban inaugure une étoile à son nom sur le célèbre Walk of fame. Que de chemin parcouru pour cet homme parti de rien qui incarne à merveille l’image du self-made-man !

Cactus et guitare

Né à Alexandrie en 1944, Haïm Saban est le fils d’un modeste marchand de jouets. Juive, sa famille est expulsée d’Égypte en 1956. À 12 ans, l’adolescent commence une nouvelle vie à Tel Aviv. Mauvais élève, indiscipliné il quitte l’école très tôt, doit vendre des cactus dans les rues ou travailler comme ouvrier agricole pour vivre. Ses rares moments de joie, il les trouve dans le groupe de rock The Lions of Judah dont il est bassiste et manager. Alors qu’il a 29 ans, le groupe s’arrête et Haïm Saban immigre en France où il s’imagine faire fortune.

Le bon filon

HSAban

Nous sommes en 1973, les Trente Glorieuses se terminent bientôt. Le jeune homme, débrouillard, a une idée de génie : les séries américaines et japonaises commencent à débarquer dans l’Hexagone mais personne ne s’intéresse aux bandes originales. Il rachète les droits pour une bouchée de pain et en fait des disques. C’est lui qui produit, réarrange puis distribue les BO de Goldorak, Les Mystérieuses Cités d’or, Starsky et Hutch, Dallas…

Conquête de l’Amérique

Voyant les choses en grand, il part à Los Angeles en 1993. Cette fois-ci, il a en poche 500 000 dollars et possède sa société, Saban Productions, qui ne demande qu’à croître. Il duplique le business model au pays de l’Oncle Sam. Mieux encore, il achète les droits de séries animées japonaises qu’il réadapte aux États-Unis. Son coup de génie ? L’acquisition de Super Sentai qu’il transforme en Power Rangers.

En 1995, il s’associe avec Rupert Murdoch et lance la chaîne Fox Kids sur laquelle il produit notamment deux séries devenues culte : Les Tortues Ninjas et Casper. Cela lui permet d’entrer dans le petit monde des milliardaires.

Il cède la franchise Power Rangers pour 522 millions de dollars à Hasbro

Culbutes

Par la suite, l’entrepreneur réussit plusieurs opérations financières qui accroissent sa fortune : en 2001, Murdoch et Saban vendent Fox Kids à Disney et les associés se partagent 5 milliards de dollars. Deux ans plus tard, le groupe audiovisuel allemand KirchMedia fait faillite, il en acquiert une part qu’il revend rapidement, empochant une belle plus-value. Autre opération réussie, la cession de la franchise Power Rangers pour 522 millions de dollars à Hasbro. Belle réussite pour le fils d’un petit marchand de jouets d’Alexandrie.

Philanthropie et investissement

Même s’il a quitté Israël tôt, le milliardaire y reste attaché et engagé. Il a monté une société de capital-risque qui finance des start-up locales, est un mécène du parti travailliste. Dans son pays d’adoption, il fait partie des super-donateurs du parti démocrate, conditionne ses versements au soutien à Israël, subventionne des think tanks qui planchent sur des solutions de paix au Proche-Orient. Son engagement à gauche ne l’empêche pas d’aimer le luxe et de l’assumer. En 2019, il s’est offert Eminence, un yacht de 80 mètres de long qu’il a racheté à l’oligarque russe Alexandre Khloponine.

Lucas Jakubowicz

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