Les opérateurs espèrent l’annonce d’un accord commercial Chine-Etats-Unis au prochain sommet du G20. Cela fait suite à des déclarations des deux parties faisant état de négociations en cours pouvant déboucher rapidement sur une sortie de la crise. Analyse avec Florent Delorme, spécialiste macro chez M&G.

Une telle information serait saluée par les marchés. Pour autant, s’agirait-il alors d’une fin des hostilités ou seulement d’un répit temporaire ?

Selon Florent Delorme, « la rivalité États-Unis – Chine fait l’objet d’un débat important dans les milieux universitaires américains, en particulier depuis la parution de l’ouvrage de Graham Allison, professeur à Harvard : Destined for War: Can America and China Escape Thucydides's Trap? (Houghton Mifflin Harcourt, Boston-New York 2017). Cet universitaire a étudié sur les cinq derniers siècles les séquences historiques où une puissance dominante était déstabilisée par l’émergence d’un rival. Il a montré que dans la majorité des cas cela avait conduit à une confrontation militaire, ou au mieux à une guerre froide comme celle qui a opposé les Etats-Unis à l’URSS. Dans le cas de la concurrence Chine-Etats-Uni, Graham Allison estime que l’opposition n’ira pas jusqu’à l’engagement des deux armées du fait de la détention par chacune de l’arme nucléaire. De plus les autorités chinoises privilégient le développement économique et la stabilité sociale et veulent éviter des tensions militaires.

Par contre, de l’avis de la plupart des experts, on peut s’attendre à la persistance d’une forte compétition dans de nombreux domaines :

- Territorial en mer de Chine du Sud et en mer de Chine Orientale ;

- Commercial avec très probablement une résurgence régulière du protectionnisme ;

- Technologique avec notamment le programme « Made in China 2025 » qui vise à faire de la Chine le leader mondial dans 10 industries stratégiques (notamment les secteurs de la robotique, des voitures autonomes, des véhicules électriques, de l’intelligence artificielle et de l’aérospatial) ;

- Diplomatique comme l’ambitieux programme de renaissance des routes de la soie « One Belt, One Road » le montre ;

- Idéologique puisqu’il s’agit pour la Chine d’imposer sa vision de l’organisation de la société face au modèle démocratique américain ;

- Médiatique, notamment la maîtrise des réseaux sociaux ;

- Monétaire avec la lutte de la Chine pour faire de sa monnaie la devise de référence internationale ou encore sa tendance à en manipuler le cours pour favoriser ses exportations ;

- Informatique dans le cadre de programmes d’espionnage industriel ou de cyberattaques ;

- Financier avec par exemple le contrôle des investissements étrangers.

Ainsi même si un accord sur la question des tarifs douaniers était annoncé à l’occasion du prochain sommet du G20, il ne devrait pas mettre un terme aux tensions entre les deux puissances et cette rivalité reviendra périodiquement créer de la volatilité sur les marchés. Pour autant, cette compétition acharnée sans confrontation militaire peut être l’occasion d’une forte progression de la productivité et de l’innovation ce qui serait à terme bénéfique pour la croissance et les actifs financiers.»

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