Novethic, filiale du groupe Caisse des Dépôts, est l’un des organismes nommés pour délivrer le label Greenfin. Nicolas Redon, responsable de la veille et expert en finance verte, donne sa vision sur cette certification et son évolution au niveau européen.

Décideurs : Quels sont les principaux critères de sélection applicables aux sociétés de gestion souhaitant obtenir le label Greenfin ? Les conditions pour en bénéficier pourraient-elle évoluer, voire se durcir dans les années à venir ?

Nicolas Redon : Le référentiel fonctionne de la même manière pour toutes les sociétés de gestion. Il s’articule autour de trois piliers. Tout d’abord, il faut s’assurer qu’il y a une stratégie d’investissement avec une recherche d’objectifs environnementaux et une attention particulière est portée aux exclusions. Dans un deuxième temps s’impose un suivi des controverses susceptibles d’affecter les actifs du portefeuille. Pour finir, un reporting d’impact environnemental est construit à partir des particularités du fonds, proposant des indicateurs d’impact adaptés aux technologies financées.  

Aujourd'hui, 42 fonds sont labellisés. D’autres demandes sont-elles en cours ? Quelles sont les ambitions, à moyen terme, du ministère de l'Écologie ?

Le label suscite de l’intérêt chez les sociétés de gestion, et d’autres demandes sont en cours. On observe aussi un « effet loi PACTE » naissant.

"Il est intéressant de voir l’intérêt commun que suscitent chez les gérants de ces fonds les entreprises qui accélèrent leur transition énergétique et écologique"

Quel regard portez-vous sur les démarches entreprises par les sociétés de gestion qui souhaitent obtenir ce label pour leur fonds ? Ont-elles développé de réelles convictions sur la question ou veulent-elles simplement surfer sur la vague de l'investissement durable ?

Nous parlons d’un vaste échantillon de sociétés de gestion. Cela peut aller de la société de gestion à taille humaine aux géants du secteur, qui disposent d’une gamme de fonds labellisés ISR déjà très conséquente. S’il existe quelques différences d’approches, il est intéressant de voir l’intérêt commun que suscitent chez les gérants de ces fonds les entreprises qui accélèrent leur transition énergétique et écologique.

Comment se positionne le label Greenfin par rapport au label belge Towards Sustainability ? Aux autres labels Européens ?

Le label belge se rapproche davantage du label ISR. Des exclusions climat ont néanmoins été introduites dans le label Towards Sustainability, pour refléter des attentes de plus en plus strictes des épargnants, contrairement au label ISR. Sur ces deux labels incontournables en termes de noms, de collecte et d’encours, à l’échelle européenne, il y a donc tout de même une volonté du label Towards Sustainability de s’ancrer dans une dynamique d’exclusion que l’on retrouve chez la plupart des autres labels européens. Pour en revenir à la comparaison avec le label Greenfin, la différence est que le label belge peut être obtenu par une grande partie du marché, contrairement au label Greenfin qui se recentre sur des fonds avec une forte thématique verte. À l’échelle européenne, les labels LuxFLAG Climate Finance et LuxFLAG Environment sont ceux qui se rapprochent le plus du label Greenfin avec des exigences très fortes sur la teneur verte du portefeuille.

".Au niveau européen, la définition de ce qui est vert sera structurée et fédérée autour d’une taxonomie d’activités vertes et durables"

L'Europe devrait-elle créer son propre label vert ?

Le processus de création d’un écolabel européen est en cours et s’oriente vers un fonctionnement similaire au label Greenfin. Les fonds éligibles en Europe seraient les plus positionnés sur des actifs sous-jacents en lien avec l’économie verte. Au niveau européen, la définition de ce qui est vert sera structurée et fédérée autour d’une taxonomie d’activités vertes et durables.

Pensez-vous que les critères composant le label Greenfin qui sont imposés aux sociétés de gestion dans le choix des entreprises qui composent leur portefeuille puissent être vertueux, au point que les entreprises les imposent elles-mêmes à leurs chaînes de fournisseurs ? 

Nous demandons aux gestionnaires des fonds candidats de fournir, selon leur analyse, le pourcentage de leur portefeuille correspondant à des produits et services verts au sein de plusieurs secteurs d’activité. Cette exigence peut les amener à questionner directement les entreprises dans lesquelles ils investissent, et celles-ci vont rapidement devoir pouvoir communiquer la part de leur chiffre d’affaires réalisé sur les marchés en lien avec la transition énergétique et écologique. C’est davantage la taxonomie qui interviendra sur les relations des entreprises avec leurs fournisseurs. Elle inclura des références à divers standards et normes afin de bien maîtriser les enjeux en matière de durabilité dans les chaînes de production. L’objectif est qu’investisseurs et entreprises s’emparent de ces sujets, car la définition d’une activité verte ou durable est conditionnée dans la taxonomie au respect de certaines normes et standards au sein d’un secteur.

Propos recueillis par Chloé Buewaert

 

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