Le 25 novembre dernier, la Fédération du commerce et de la distribution a annoncé le lancement d’une campagne d’information commune à l’ensemble des enseignes de la grande distribution. Le but : mieux accompagner les personnes salariées victimes de violences conjugales et intra-familiales.

La Fédération du commerce et de la distribution (FCD) s’est récemment saisie du sujet des violences conjugales, consciente de la surexposition des jeunes femmes et des personnes salariées de ce secteur vivant en zones rurales et ayant un faible niveau de qualification professionnelle. En effet, 50% des féminicides ont lieu au sein des zones rurales, qui abritent 33% de la population française.

Écouter et protéger les victimes

Un dispositif est ainsi en cours d’implémentation, au sein de la branche professionnelle, afin de sensibiliser l’ensemble des parties prenantes et de proposer des solutions immédiates aux 650 000 employés du secteur. Celui-ci comprend ainsi l’écoute et l’orientation des victimes vers des structures partenaires associatives et publiques en mesure de fournir une assistance juridique, psychologique et sociale. En outre, des solutions concrètes sont prévues, telle que la garantie d’hébergement d’urgence, alors que 40 % des victimes de violences conjugales sont laissées sans solution d’hébergement d’urgence selon la Fondation des femmes. Parmi les mesures, figurent aussi, la mobilité géographique professionnelle d’urgence, l’aménagement des horaires ou encore des autorisations d’absences.

La formation des services de ressources humaines est également prévue en vue d’accompagner au mieux les personnes concernées.

Layla Rahhou, déléguée générale de la FCD souligne “un engagement historique des entreprises de la branche sur ce sujet si crucial”, et rappelle que “la distribution, figurant parmi les principaux employeurs français, a un rôle majeur à jouer auprès de ses salariés”.

Satya Goetz Lancel, Responsable de gestion de crises des Magasins U et en charge du sujet inter-enseignes sur les violences conjugales de la FCD, a été l’une des premières à se saisir de ce sujet essentiel, et a œuvré à la mise en place d’une politique relative au soutien des salariés victimes de violences conjugales au sein de la Coopérative U. Un engagement pris à la suite du décès d’une collaboratrice victime de violences conjugales, en 2018. Satya Goetz Lancel se réjouit aujourd’hui du chemin accompli, et d’une “innovation née de problématiques rencontrées sur le terrain”.

À lire : Ingrid Crambes-Tisserand et Satya Goetz Lancel (Magasins U) : "On ne peut pas séparer vie professionnelle et personnelle sur les enjeux de violence"

Celle à qui l’on a d’abord dit que modéliser un dispositif de soutien et l’étendre à l’ensemble des enseignes était impossible perçoit dans cet accord de branche les prémices d’un changement social profond. Convaincue du rôle des entreprises dans la lutte contre les violences conjugales ou intra-familiales, Satya Goetz Lancel constate que “les enseignes se montrent très volontaires, tant qu’elles sont formées à utiliser des outils”.

Changer le droit du travail

Le 19 novembre 2024, le député LFI Louis Boyard déposait une proposition de loi visant à protéger les personnes victimes de violences conjugales dans le monde du travail. Cosignée par des représentants des Verts, du Parti socialiste et du Parti communiste et fondée sur les recommandations énoncées par l’Organisation internationale du travail (OIT) dès 2019, elle a pour objectif de rattraper le retard de la France en prévoyant plusieurs protections pour les employés.

Parmi celles-ci figurent l’interdiction de licenciement des victimes et la possibilité de bénéficier de dix jours de congés supplémentaires, afin d’effectuer les démarches administratives et judiciaires nécessaires. Est également prévue une dispense de préavis en cas de démission ou de rupture conventionnelle.

Le texte propose par ailleurs de reconnaître des droits supplémentaires : le droit à la mobilité géographique et fonctionnelle afin que la victime puisse changer de lieu de travail si elle le souhaite, lorsque l’entreprise dispose de plusieurs établissements, ainsi que le droit à un aménagement du temps de travail, entre autres. Reste à espérer que ce texte retiendra l’attention du gouvernement et des députés afin que la précarité ne vienne pas s’ajouter à la violence, dans le cortège des maux dont sont victimes les plus fragiles.

Caroline de Senneville

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