Après avoir fondé et vendu Qapa, Stéphanie Delestre lance avec ses anciens CPO et CTO, Volubile.ai. Une start-up qui propose aux entreprises d’utiliser des agents conversationnels afin d’accélérer leur développement commercial et affermir leur relation client. L’entrepreneuse, également jurée pour la nouvelle saison de Qui veut être mon associé ? sur M6, nous en dit plus sur sa nouvelle aventure dans l’IA.
Stéphanie Delestre (Volubile.ai) : "L’IA arrive pile au bon moment pour répondre à certaines difficultés de recrutement"
Décideurs. Après Qapa, vous vous lancez dans une deuxième aventure entrepreneuriale. En quoi consiste votre nouveau projet, Volubile.ai ?
Stéphanie Delestre. Avec Julien Ros et Maxime Ianeselli, nous lançons une start-up qui réinvente la relation client et la prospection commerciale. Nous avons créé un agent conversationnel capable d’échanger comme un être humain et de mener des appels entrants et sortants. Cet outil s’adresse à toutes les entreprises, qu’elles soient grandes ou petites dès lors qu’elles font de la relation client ou de la prospection. Notre produit fonctionne depuis hier chez notre premier client.
Comment ces agents conversationnels fonctionnent-t-ils ? Peut-on les comparer aux assistants virtuels qui répondent aux questions sur les sites internet ?
Non, ce n’est pas du tout les mêmes technologies que celles utilisées par les chatbots, qui reposent sur des arborescences décisionnelles. Nous nous sommes appuyés sur les dernières évolutions de l’IA et notamment sur les LLM (large language models ou grands modèles de langage, NDRL). La machine apprend de ses anciennes conversations mais aussi pendant la conversation. L’échange est fluide et permet aux clients d’obtenir ce pourquoi ils ont appelé.
Ne craignez-vous pas que ce projet mette l’humain de côté ?
On me pose souvent cette question et la réponse est très facile. S’il est très formateur, le métier de téléopérateur – que j’ai moi-même exercé par le passé – est très compliqué et les recruteurs font face à beaucoup de turnover. Cette profession est déjà très automatisée. Nous accélérons le mouvement. Notre solution va permettre aux collaborateurs de se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée, rendre le métier moins répétitif et donc plus agréable. Le client est également gagnant car les questions simples seront traitées sans temps d’attente et plus rapidement car l’agent conversationnel peut prendre autant d’appels que nécessaire et ce 24/24h 7/7 jours. De son côté, l’entreprise offre à ses clients une qualité d’expérience égale. L’IA arrive pile au bon moment pour répondre à certaines difficultés de recrutement et de pénibilité de l’emploi.
Toutes les entreprises peuvent-elles s’offrir ce service ?
Les petites entreprises n’ont pas forcément les moyens de rémunérer une équipe commerciale à l’année, mais peuvent avoir certains besoins ponctuels en fonction de leurs pics d’activité. On peut imaginer qu’une entreprise qui vend des drapeaux français puisse appeler des mairies en vue des Jeux olympiques afin de savoir si elles ont besoin de drapeaux pour l’événement. Plutôt que de recruter un commercial, elle peut mener un sprint éclair avec Volubile.ai.
Avez-vous des concurrents ?
Les développements liés à l’IA vont forcément pousser beaucoup de monde à proposer de nouvelles solutions. Nous nous concentrons sur la verticale commerciale. Aujourd’hui beaucoup d’entreprises proposent des chatbots mais pas d’agent conversationnel qui réponde par téléphone car la barrière technologique à l’entrée s’avère très importante, en particulier concernant les temps de latence. Quand un bot vous répond sur un site, vous voyez des points de suspension s’afficher. À l’oral, cela n’est pas possible. Nous n’allons pas diffuser une petite musique. Nous avons tellement bien optimisé notre outil que notre temps de latence échappe à la perception humaine. Cela a été un gros sujet tech et nous y sommes arrivés. Comme dans tout bon secteur, nous allons avoir des concurrents. Nous sommes donc condamnés à avoir le meilleur produit.
"Comme dans tout bon secteur, nous allons avoir des concurrents. Nous sommes donc condamnés à avoir le meilleur produit"
Comment êtes-vous financé ?
Nous sommes trois cofondateurs et nos premiers salariés sont arrivés hier. Grâce à la vente de Qapa, j’ai pu mettre des sous dans Volubile.ai et rémunérer les premiers développeurs. Nous mènerons certainement une première levée de fonds rapidement afin d’accélérer. Nous disposons de la machine mais pas de tout le back office. Nous souhaitons développer des fonctionnalités, comme la possibilité pour les entreprises de relier leurs outils à notre service.
Que mettrez-vous en avant pour pitcher Volubile.ai ?
Avec Julien et Maxime nous avons déjà un track record. Nous avons vendu Qapa, une entreprise française sur un sujet très précis et de service, l’intérim, pour un peu moins de 100 millions d'euros à un leader mondial, Adecco. Nous avons déjà travaillé ensemble et réussi. Nous nous connaissons très bien. Par ailleurs, nous avons la chance de nous lancer au moment de la révolution de l’IA. Le time to market va être très important car beaucoup de gens vont s’approprier l’intelligence artificielle. Notre équipe peut développer rapidement un service de haute qualité. Ensuite, nous nous adressons à un très gros marché qui concerne toutes les entreprises dans le monde. Quand nous parlons avec les chefs d’entreprise ils comprennent tout de suite ce que l’on peut apporter. Enfin, nous sommes un SaaS BtoB. Or, en période de crise, les entreprises ne font jamais d’économies sur le service commercial.
Vous êtes jurée dans la nouvelle saison de Qui veut être mon associé ? sur M6. Qu’est-ce qu’un bon pitch selon vous ?
Les investisseurs sont généralement spécialisés sur certains sujets. Je suis plutôt BtoB et deeptech. Un entrepreneur qui ouvre une pâtisserie peut me faire adorer son idée mais ce n’est pas mon secteur. Je ne vais pas être la meilleure pour l’aider. Avant de faire son pitch, il faut savoir à qui on le présente. Je conseille aussi de pitcher des investisseurs que l’on ne veut pas forcément à son capital et que l’on n’intéresse pas non plus afin de voir comment ils réagissent, d’avoir des retours de leur part et de s’améliorer. Enfin, les investisseurs veulent des entrepreneurs ambitieux. Tous savent que c’est très dur de monter sa boîte, qu’il va peut-être falloir parfois pivoter. Les entrepreneurs doivent être capables d’écouter afin d’entendre les bons conseils et d’accélérer. Cette capacité d’écoute, je la repère à la façon dont ils répondent aux questions.
Propos recueillis par Olivia Vignaud