Dans un contexte de financement compliqué pour de nombreux groupes cotés, les Ocabsa ont plus que jamais leur place dans le financement alternatif. Erytech, TxCell, Global Bioénergies, Archos et d’autres encore y ont fait appel. Attention cependant à savoir doser son investissement avant de recourir à ce type d’obligations convertibles.

Si les PGE (Prêts garantis par l’État) représentent une réelle bouffée d’oxygène pour de nombreuses entreprises, ces prêts n’en restent pas moins un écueil insurmontable pour d’autres. Déjà en difficulté, certaines PME ou ETI n’y ont pas accès et peinent à obtenir l’écoute des banques, accaparées par le rythme imposé par le nombre de demandes de ces mêmes PGE. Une boucle infernale qui risque de mettre à terre nombre d’entreprises dans cette période incertaine. Si le financement privé peut répondre en partie à leurs besoins, l’une des dernières options – pour les entreprises cotées – serait de passer par les Obligations convertibles et notamment les Ocabsa (Obligations convertibles en actions assorties de bons de souscription d’actions).

Apparues aux États-Unis au tournant des années 2000, ce n’est qu’une quinzaine d’années plus tard qu’elles se développent en France. Un lustre suffira pour en faire une alternative solide à l’heure de se financer, notamment dans le secteur des biotechs. Pour répondre à la demande, des fonds d’investissement souvent anglo-saxons et des family offices parmi lesquels Alpha Blue Ocean et Park Partners GP disposent en France d’équipes dédiées. Ces derniers entrants – très actifs – viennent directement concurrencer les acteurs historiques que sont L.1 Capital, Yorkville Advisors ou encore Atlas Capital Markets.

Principe de fonctionnement

S’il s’agit d’un marché de niche qui s’est rapidement développé, c’est aussi, bien souvent, la dernière solution pour des groupes confrontés à des problématiques de développement n’ayant plus accès aux financements traditionnels. Concrètement, les Ocabsa sont composées de deux titres émis conjointement : l’Obligation convertible en actions d’une part, le Bon de souscription d’actions de l’autre. Avec une maturité très courte, allant de six mois à trois ans généralement, alliée à un taux d’intérêt souvent faible du fait de la présence de BSA, ce financement répond aisément à des émissions de quelques millions d’euros et des levées de fonds échelonnées dans le temps.

Pour Éric Soyer, directeur général adjoint et directeur financier d’Erytech : « La nature zéro coupon des obligations, la décote limitée lors de la conversion en actions ainsi que le nombre réduit de BSA attachés aux obligations témoignent d’un alignement d’intérêt clair entre Erytech et Alpha Blue Ocean ». Pierre Vannineuse, fondateur d’ABO, et Frédéric Sutterlin, venture partner pour la France, inscrivent leurs investissements dans la durée : « Nous nous substituons aux banques pour proposer à des sociétés cotées des solutions de financement qui vont répondre à leurs besoins. Nous finançons des projets entrepreneuriaux risqués que plus personne ne veut supporter. Nous y croyons et nous inscrivons dès lors dans la durée et dans l’accompagnement de ces projets. ». Très flexibles, particulièrement souples, leurs équipes décident très vite. Un réel atout à l’heure d’accompagner des sociétés technologiques souvent à la charnière dans leur recherche d’un second souffle.

Maturité = responsabilité

Attention cependant à la surchauffe. Grandir c’est aussi devenir responsable. Au cœur de l’été, l’AMF s’est fendu d’une alerte afin d’inviter les émetteurs à se montrer vigilants à l’heure de se financer via des Ocabsa et autres formes d’equity lines. Le régulateur ne remet pas en cause leur intérêt sur le marché. Cependant, il se préoccupe du phénomène d’accoutumance chez certaines entreprises qui ne parviennent plus à se financer ailleurs. L’autorité rappelle ainsi qu’il s’agit de produits pour « entreprises averties » et que ce mode de financement « comporte des risques très significatifs, à la fois pour l’émetteur, les actionnaires et les investisseurs. Le financement est in fine assuré par le marché, entraînant une dilution des actionnaires, voire une pression à la baisse sur les cours. » Une réalité dans certains cas, quand les projets de développement ne remplissent pas leurs objectifs. Cependant, pourquoi prendre un tel risque si ce n’est, précisément, parce que ces entreprises n’auraient sans doute pas trouvé de financement ailleurs. Ou très difficilement. Et généralement trop tard.

Quoi qu’il en soit, l’AMF pose des bases jugées nécessaires par certains des acteurs de ce marché conscients du risque d’image. C’est le cas de Simon Le Reste, jusqu’alors chez Reed Smith, qui a pris la direction de Park Partners GP. Un avocat à la tête d’un fonds d’investissement pour donner le signe d’une plus grande attention au cadre donné aux investissements ? Sans doute. A minima, le rappel qu’il existe un réel risque réputationnel pour l’ensemble de ce marché dès lors que les (petits) porteurs, en place jusque-là, seront lésés.

Alexis Valero

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