Le rêve chinois de Renault
En annonçant sa volonté d’instaurer des quotas de véhicules électriques dès l’année prochaine, le gouvernement chinois attise la convoitise des constructeurs automobiles. Et pour cause, le potentiel est gigantesque. Si le prochain plan quinquennal fixe bel et bien comme ambition le pourcentage de 20 % de véhicules électriques, la Chine deviendrait le premier marché mondial à horizon 2020. Arrivé en retard sur le marché, étant même l’une des dernières à s’y implanter, le groupe Renault ne compte pas se laisser distancer cette fois-ci.
Une stratégie ambitieuse
Pour s’engager sur la bonne voie, la marque au losange vient d’annoncer une joint-venture avec son homologue chinois Dongfeng. Baptisée eGT New Energy Automotive, l’entité produira des véhicules électriques dans une usine du constructeur asiatique. De son côté, le groupe Renault apportera la technologie et la structure de base du véhicule. L’objectif de ce rapprochement est de proposer des voitures à des prix abordables pour les classes moyennes - environ 8 000 dollars. Renault et Nissan ont pris chacun de 25 % de cette coentreprise, dont l’autre moitié du capital revient à Dongfeng, connu en France pour être le principal actionnaire de PSA.
Mais Renault sait que la victoire est encore loin d’être gagnée. Pendant longtemps, le groupe s’est heurté à un mur. Suite à un accord signé en décembre 2013, là aussi avec Dongfeng, il crée une coentreprise intitulée Dongfeng Renault Automotive Company (DRAC). Cette dernière lui a permis d’ouvrir en 2016 sa première usine sur le sol chinois. Ce site, qui fabrique actuellement les modèles Kadjar et Koleos de Renault, dispose d’une capacité de production de 150 000 unités par an. Problème, l’industriel français n’en aurait écoulé l’an dernier qu’entre 30 000 et 50 000… Mais il n’est pas le seul à connaître des difficultés. PSA, qui est présent sur le territoire depuis les années 1980, n’arrive pas à dépasser les 3 % de part de marché. Fidèle à sa politique protectionniste, la Chine a mis en place une politique économique très contraignante pour les constructeurs étrangers, quasiment tous obligés de réaliser des joint-ventures avec des acteurs locaux. Seul Nissan s’en sort un peu mieux avec un part de marché légèrement supérieur à 4 % l’an dernier.
Premier constructeur étranger
Pour autant, Renault ne baisse pas les bras. En parallèle de son arrivée sur le marché des voitures électriques, la marque au losange vient de signer un accord de coopération avec le chinois Brilliance China Automotive (CBA) dans le cadre d’une joint-venture pour entrer au capital de sa filiale de véhicules utilitaires. Un secteur porteur estimé à trois millions de véhicules par an. Pour le constructeur tricolore, le coût de l’opération est estimé à un yuan symbolique, la structure ayant affiché une perte après impôts de 91 millions d’euros. Mais Renault et CBA devraient injecter 155 millions d’euros dans les douze prochains mois. Une stratégie qui a déjà échoué dans les années 1990, Renault avait subi un premier échec en s’alliant au chinois Sanjiang pour produire localement son Trafic. Avec Brilliance, Renault espère profiter de la marque Jinbei – laquelle a écoulé plus de 268 000 véhicules l’an dernier.
Grâce à son usine et à ses deux nouvelles joint-ventures, le groupe Renault compte atteindre 3,5 % de part de marché dans le pays d’ici à cinq ans. Cumulée à celle de Nissan, elle ferait tout simplement de l’alliance dirigée par Carlos Ghosn le premier constructeur automobile étranger dans l’empire du Milieu. Confiant dans sa capacité à relever ce défi, Renault a récemment fait savoir que la capacité de production initiale de son usine pouvait être doublée à 300 000 véhicules par an.