Si le budget alloué par la France figure parmi les plus élevés des pays membres de l’UE, il ne représente que 0,21 % du PIB de l’État. Loin de la médiane européenne qui se situe à 0.28%.

Quelles ont été les performances de la justice européenne en 2022 ? C’est ce que la commission européenne pour l’efficacité de la Justice a tenté de décrypter au cours du dixième cycle d'évaluation. Analyse des systèmes judiciaires de 44 États membres du Conseil de l'Europe et de ceux d’Israël et du Maroc, les “deux États observateurs”, cette édition est la première qui collecte des données post-Covid. Un point à soulever, puisque comme le rapport le précise “la pandémie a également affecté le fonctionnement de la justice en Europe”. Globalement, la part du budget à la justice dans ces 46 pays ne représente toujours qu’un faible pourcentage du PIB par rapport à d'autres secteurs publics. La Cejep l’estime à 0,31 % du PIB. La médiane européenne se situe à 0,28 % du PIB. D’après ses calculs, les dépenses des pays européens dans leurs systèmes judiciaires s’élèvent à 1,1 milliard d'euros. Ce qui équivaut à 85,4 euros par habitant en 2022, contre 77,19 en 2020. 

Dans l’Hexagone, le budget du système judiciaire exécuté en 2022 se chiffre à plus de 5 milliards (5 253 244 613 euros). Il comprend les budgets alloués aux tribunaux, au ministère public et à l’aide judiciaire, soit les composantes communes à tous les États membres qui servent de base pour assurer la comparabilité des données. Il est donc à distinguer du budget de 8,9 milliards indiqué par le ministère public, qui comporte davantage de postes de dépenses – notamment celles relatives au système carcéral. Cinq milliards, c’est 7,4 points de pourcentage de plus qu’en 2020. Cela revient à 77,2 euros consacrés à la justice par habitant. Si ce chiffre reste supérieur à la médiane européenne, il est inférieur en pourcentage de PIB.

Plus positif : le rapport indique une augmentation de 12 % pour le budget de l'ensemble du système de justice entre 2020 et 2022. Ici, on parle du budget qui inclut un plus grand nombre de dépenses, par exemple le système pénitentiaire, les services d’exécution, la défense des intérêts de l’État, etc.). Une pente que la France devrait continuer de monter avec l’annonce de la chancellerie d’une enveloppe pour 2024 au “montant inédit” de 10,1 milliards d’euros. Toujours selon les données du ministère, la Justice aurait vu son budget gonfler de 33 % en cinq ans (entre 2017 et 2022). La période faste s’achève à l’arrivée de Didier Migaud à la Chancellerie : le budget 2025 de son ministère n’a pas échappé pas au coup de rabot. Il n’atteint que 10,24 milliards d’euros, soit 500 millions d’euros de moins que ce qui avait été fixé par la loi de programmation 2023-2027. D’après les chiffres retenus par la commission, seul 0,20 % du PIB annuel de la France était destiné en 2022, contre 0,26 %, 0,30 % et 0,31 % chez nos voisins néerlandais, allemand et italien.

La France compte 3 procureurs pour 100 000 habitants contre 24 en Bulgarie ou en Lettonie

Dans le détail : selon les travaux de la Cejep, le budget des tribunaux français atteignait en 2022 54,3 euros par habitant, et celui du ministère public plafonne à 13,6 euros, sous la médiane. Avec seulement trois procureurs pour 100 000 habitants, la France fait partie des mauvais élèves. Là où la Bulgarie, la Lettonie et la Moldavie en comptent 24, et où la médiane européenne atteint 11,2 procureurs. La France compte 11 juges pour 100 000 habitants. C’est bien en dessous de la moyenne de 21,9 des 46 États européens (et la médiane de 17,6). Du côté de l’aide judiciaire, l’approvisionnement de son budget place le pays des droits de l’Homme au-dessus de la médiane européenne. La France appartient d’ailleurs aux groupes d’États disposant du plus large éventail d’aide juridictionnelle.

Justice sous-dimensionnée

La commission constate que sur le Vieux Continent, les fonctions judiciaires se féminisent. En France, il y a davantage de femmes tant chez les juges professionnels (73 % au siège) que chez les procureurs (59 % au parquet). Le plafond de verre existe toujours et rend difficile l’accès des dames aux fonctions hiérarchiques les plus élevées, au siège comme au parquet. On observe que dans de nombreux États de l’étude – les pays scandinaves, l’Irlande, l’Allemagne, la Pologne, l’Italie, etc. –, les cours suprêmes comptent davantage d’hommes que de femmes en 2022. Le Royaume-Uni et l’Écosse font montre d’un retard en matière de parité. Ils sont les deux seuls pays à avoir un pourcentage d’hommes plus élevé toutes instances confondues. Pour ce qui est des robes noires, les femmes gagnent du terrain partout en Europe. Leur proportion chez les avocats a augmenté sur l’ensemble du territoire européen, passant de 43 % à 44 % entre 2018 et 2022.

Pour la Chancellerie, il "faut poursuivre les efforts déjà déployés pour sortir la justice du sous-dimensionnement auquel elle a été trop longtemps réduite". Place Vendôme, les équipes ministérielles suivent déjà quelques pistes, confirmées par la Cejep : le renforcement du parquet ; la nécessité de poursuivre la constitution des équipes autour du magistrat ; l’accélération du financement, du déploiement et de l’utilisation des outils numériques.

Anne-Laure Blouin 

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