Dominique de Préneuf, directeur général de Franklin Templeton France nous dresse un panorama complet de l'actualité des marchés financiers.
Décideurs. En tant qu’investisseurs obligataires à l’international, que pensez-vous de la situation en Ukraine ?
Dominique de Préneuf.
Selon nous, l’Ukraine dispose d’un potentiel gigantesque à long terme. Le pays possède une incroyable richesse du point de vue du capital humain et du patrimoine agricole, et bénéficie d’un positionnement stratégique tant géographique que géopolitique, étant située au carrefour de l’Europe occidentale et des pays d’Europe orientale. Malgré quelques difficultés budgétaires à court terme, son niveau d’endettement est modeste. Légèrement supérieur à 40 %, le ratio dette/PIB est selon nous gérable ; cela correspond en effet à la moitié du ratio des États-Unis et une petite fraction de l’endettement typique des pays « en difficulté ». Initialement, l’Ukraine nous semblait une destination logique en tant qu’investisseurs obligataires. Puis la crise a éclaté.
La réponse de la communauté internationale à la crise ukrainienne a été de miser sur la coopération et la rapidité d’intervention. Les États-Unis, l’Europe, le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont engagé un dialogue afin d’élaborer des réformes visant non seulement à résoudre les difficultés à court terme sur le plan de la liquidité mais aussi à exploiter le potentiel de développement économique à long terme. Selon la Banque mondiale, la priorité est de restaurer la stabilité macroéconomique et du secteur financier. Cela doit s’accompagner de grandes réformes structurelles censées relancer la croissance. L’institution financière a ainsi estimé qu’avec l’adoption rapide de « politiques budgétaire et monétaire adaptées », l’Ukraine devrait retrouver le chemin de la croissance en 2015.
Avec plus de 190 milliards de dollars d’actifs gérés en obligations internationales, nous pensons que Franklin Templeton a les ressources nécessaires pour réaliser des investissements que l’on pourrait qualifier de massifs pour un pays unique, et de conserver ces positions aussi longtemps que possible, dans la mesure où elles sont généralement moins importantes que celles de certains portefeuilles plus conséquents.

Décideurs. Quels sont les secteurs qui vous paraissent actuellement les plus attractifs sur le marché « action » ?
D. de. P.
La plupart des questions que se posent nos clients en ce moment concernent la vigueur des marchés boursiers durant les cinq dernières années. Ceux-ci ont en effet enregistré une reprise quasi ininterrompue depuis leur creux de février/mars 2009.
Le secteur de l’énergie retient notre attention et particulièrement le segment des sociétés de services énergétiques, où nous avons identifié diverses opportunités d’investissement. Les entreprises qui disposent de la technologie et du savoir-faire nécessaires à l’assistance des principales compagnies pétrolières intégrées dans la recherche et l’exploitation de nouveaux gisements possèdent de sérieux atouts. Le marché ne nous semble pas les apprécier à leur juste valeur. Les valorisations nous paraissent attrayantes dans ce sous-secteur promis à une croissance à long terme.

Décideurs. Qu’en est-il de l’Europe ?
D. de. P.
L’Europe se situe en ce moment à un carrefour intéressant selon nous. La période 2011/2012 convenait vraisemblablement aux investisseurs acceptant avec le sourire que leurs investissements fassent le yo-yo… Dans les faits une infime minorité ! Personne ou presque ne souhaitait investir en Europe, tellement les craintes de dislocation de l’UE ou de désintégration de l’euro étaient élevées. Il s’agissait d’une période particulièrement fertile en titres sous-évalués, mais celle-ci tire à sa fin. Nous continuons à investir en Europe, principalement dans le secteur financier et accessoirement dans certaines sociétés industrielles ou de la santé, lorsque nous observons des actions qui se négocient à un cours inférieur à celui de leurs concurrentes à l’échelle mondiale. Dans l’ensemble, les écarts de valorisation se sont largement atténués et ne constituent plus des opportunités aussi alléchantes qu’il y a quelques années. Cela étant dit, l’Europe demeure une priorité pour nous.

Décideurs. Le placement obligataire : stop ou encore ?
D. de. P.
Les taux d’intérêt commencent à progresser après une longue période pendant laquelle les banques centrales ont maintenu les taux directeurs à des niveaux historiquement bas pour faire face à l’ampleur et à la gravité de la crise financière.
Comment gérons-nous nos investissements obligataires dans un contexte de remontée progressive des taux américains et d’embellie économique graduelle ? Il nous semble que la capacité de penser et d’intervenir à l’échelle mondiale est aujourd’hui cruciale pour les investisseurs obligataires, afin de bénéficier, en dehors des États-Unis, d’une dynamique de taux d’intérêt différente, d’un meilleur potentiel de croissance et d’un niveau d’endettement public inférieur. Étant donné la fragmentation des marchés obligataires à laquelle nous avons assisté cette année dans les pays émergents, les mouvements de correction ne se justifiaient pas dans de nombreux cas sur la base des fondamentaux. Pour Franklin Templeton, ces périodes de forte volatilité sont idéales pour dénicher certaines opportunités pourvues d’un bon potentiel, particulièrement sur les marchés émergents et frontières. Nous envisageons d’investir dans plusieurs régions, mais l’Asie (hors Japon) et l’Europe de l’Est suscitent toujours autant notre intérêt.
L’Europe offre selon nous des opportunités supplémentaires en raison de la diversité de ses émetteurs souverains. Par exemple, le différentiel de rendement entre les obligations souveraines italiennes et allemandes nous paraît toujours attrayant malgré le resserrement significatif des spreads depuis mi-2012.
Selon nous, l’investissement obligataire réclame également de ne pas se limiter aux émissions d’État. Dans l’ensemble, les obligations d’entreprise (notamment les segments « investment grade » et à haut rendement) nous semblent offrir un bon potentiel en ce moment, en raison de l’amélioration du contexte économique. Les obligations d’entreprise, en particulier celles qui sont à duration courte, présentent par ailleurs une corrélation faible avec d’autres grandes classes d’actifs, ce qui permet de renforcer la diversification des portefeuilles. Nous pensons qu’en ce sens, le crédit peut constituer une source intéressante de liquidité et de préservation du capital, tout en offrant un fort potentiel en termes de performance d’investissement. Les prêts à effet de levier (également appelés prêts à taux variable) retiennent également notre attention pour nos portefeuilles multi-sectoriels. Il s’agit de prêts bancaires dont le taux varie en fonction des taux de marché, exposant ainsi leurs détenteurs à un risque de taux inférieur à celui des prêts à taux fixe.

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