Cette entrepreneuse, désormais directrice générale de la Mission French Tech, connaît bien les problématiques de l’écosystème. Elle présentait en janvier un plan pour améliorer le business, la compétitivité et le financement des entreprises, sur la base de ses convictions et d’échanges avec les parties prenantes.

La veille de notre entretien avec la nouvelle patronne de la Mission French Tech, Julie Huguet, l’écosystème de l’intelligence artificielle venait de faire face à un coup de tonnerre. Le chinois DeepSeek révélait un nouvel agent conversationnel efficace et moins cher à produire que celui de ses concurrents américains. Il n’en fallait pas plus pour mettre à mal les grands acteurs du pays de l’Oncle Sam sur les marchés. Mais le vrai perdant n’est-il pas l’Europe, peu ou pas cité dans cette course à l’IA ? Faut-il s’en inquiéter ? "Je reste optimiste, c’est un trait de caractère que partagent les entrepreneurs, réagit Julie Huguet. Si on regarde trop ce qui se passe autour de nous, on se tétanise à chaque effet d’annonce et on n'avance plus." La dirigeante se félicite de la tenue à Paris du Sommet pour l’action sur l’IA dès le 6 février qui permettra à la France de monter de quoi elle est capable. "C’est une belle opportunité."

La dirigeante a, de son côté, dévoilé en janvier son plan stratégique pour les trois ans à venir. Julie Huguet a pu s’appuyer sur la feuille de route qu’elle avait imaginée au moment de candidater pour le poste. Celle-ci lui a servi de base pour mener des consultations avec l’écosystème de manière à présenter le meilleur projet possible.

Le nerf de la guerre

Si Julie Huguet était déjà persuadée qu’il fallait créer des ponts entre les fonds de venture capital et les entreprises en régions – puisque plus d’une start-up française sur deux est créée en dehors de Paris –, elle a élargi le sujet après concertations. Son but ? Améliorer de manière plus globale les relations entre les fonds et les jeunes pousses afin de doper l’investissement.

"Il n’y a pas que le numérique dans la Tech"

La directrice connaît bien les sujets financier et les problématiques liées à l’hyper croissance pour avoir cofondé sa propre start-up à Annecy en 2018. Elle a levé 1,2 million d’euros et cédé Coworkees en 2021 à Freelance.com. "J’ai eu l’occasion de voir comment ça se passait du côté des start-up. Après la revente, je me suis retrouvée au comex d’une société cotée qui avait la même croissance qu’une start-up mais avec les contraintes des marchés publics." Chez Coworkees, Julie Huguet est passée de 0 à 70 000 freelances référencés sur la plateforme (et même 300 000 lorsqu’elle était chez Freelance.com où elle est restée deux ans) et de 0 à 15 collaborateurs. Le sujet des financements, actuellement plus difficiles, mais aussi des introductions en Bourse pour les jeunes entreprises ainsi que celui de leur revente (dit l’exit) sont au cœur de son action.

Business first 

Julie Huguet insiste également sur la nécessité de penser les start-up dans toutes leur diversité. Celle qui a été présidente du bureau d’Annecy de la French Tech avant de prendre la tête de la mission en charge des Alpes note que son expérience lui "a ouvert l’esprit sur l’écosystème de la région et montré qu’il n’y a pas que du numérique dans la tech, mais aussi d’autres secteurs comme l’industrie qui sont des sujets clés pour la souveraineté."

Malgré tout, "la priorité, c’est d’accélérer le business." Comment ? "En permettant aux start-up de nouer des contrats avec les grands comptes et des donneurs d’ordres publics." Sa prédécesseure, Clara Chappaz, avait lancé en juin 2023 un programme en ce sens, "Je choisis la French Tech". Pour l’instant, 600 entreprises se sont engagées. Objectif ? Atteindre les 1 000 d’ici à la fin de l’année.

Se différencier

Les start-up françaises doivent aussi faire face à une concurrence européenne et internationale de taille. Pour se différencier, elles sont appelées à miser sur "l’excellence à la française". C’est-à-dire sur la qualité du service et des produits que sont capables de produire nos entreprises. Julie Huguet souhaite les pousser à intégrer l’IA dès leurs débuts, que ce soit dans leurs process ou la gestion de leurs relations clients, ou encore à faire valoir leurs engagements en matière de RSE, meilleurs que dans d’autres pays. "Pour moi, la French Tech est l’alliance réussie des entrepreneurs et de l’État", conclut la directrice. Bilan de cette collaboration dans trois ans.

Olivia Vignaud

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