Désormais emmené par Ursula von der Leyen, l’exécutif européen doit avancer sur de multiples sujets réglementaires. La France a son rôle à jouer dans les débats. L’Autorité de la concurrence (1/2) et l’Autorité des marchés financiers (2/2), par la voix de leurs présidents respectifs, livrent leurs réflexions.

Entretien avec Robert Ophèle, Président de l’Autorité des marchés financiers

Décideurs Juridiques. Qu’attend l’AMF de la prochaine Commission européenne ? Quelles devraient être ses priorités pour les marchés financiers selon vous ?

Robert Ophèle. 2020 sera l’année de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Cette sortie doit nous conduire collectivement à revisiter notre réglementation financière pour rendre notre système financier plus efficace, mieux intégré et plus attractif. Les révisions des textes européens annoncées doivent aussi être l’occasion de clarifier, de recalibrer (là où c’est nécessaire du fait de la sortie du Royaume-Uni) et de simplifier les exigences lorsque ces dernières ne vont pas dans le sens des objectifs poursuivis.

L’Europe doit notamment favoriser le développement et l’autonomie de ses marchés et leur attractivité en matière de financement en revisitant les règles concernant les obligations de négociation, les obligations de transparence ou celles pénalisant la recherche. Il s’agit également de renforcer la protection des investisseurs non professionnels en simplifiant les informations qui leur sont données, en particulier au titre des coûts des produits qui leur sont proposés, et en renforçant les pouvoirs d’intervention de l’Esma.

Il nous semble que l’Europe devrait s’atteler le plus vite possible à un label européen pour la gestion responsable

La gestion collective est au cœur du développement des marchés de capitaux. À ce titre, elle est un condensé des défis qui doivent être relevés : réorientation des flux de capitaux en direction de la finance durable en évitant le green washing, convergence effective des règles dans l’Europe et clarification des responsabilités des différents superviseurs, maîtrise des risques associés à un développement rapide de produits trop souvent perçus comme présentant une liquidité garantie, commercialisation de produits financiers adaptés aux besoins des épargnants avec un coût compétitif. Cela appelle de mon point de vue une approche ambitieuse du cadre réglementaire européen.

Dans son programme, la nouvelle présidente de la Commission européenne met l’accent sur les investissements durables. À votre avis, quelles doivent être les priorités de l’Europe d’un point de vue réglementaire pour faciliter le développement de ces solutions ?

L’Union européenne, sous l’impulsion de la Commission, a obtenu des résultats considérables en 2019 dans le domaine de la finance durable, avec notamment l’adoption de trois règlements sur la taxonomie, les indices et la transparence (disclosure). Un travail important est maintenant nécessaire pour mettre en musique ces nouvelles exigences et accompagner les acteurs. D’autres chantiers s’ouvrent cependant à nous : définir un cadre plus robuste de reporting extra-financier pour les sociétés (la décision de la Commission européenne de revoir la directive sur l’information extra-financière va dans ce sens), réfléchir au cadre d’activité des agences de notation et fournisseurs de données extra-financières en raison de leur rôle de plus en plus structurant, envisager les moyens de rendre plus lisibles pour l’investisseur les différentes approches ESG au-delà des obligations de transparence, ce qui peut passer par la définition de standards minimums. Il nous semble aussi que l’Europe devrait s’atteler le plus vite possible à un label européen pour la gestion responsable, qui viendrait compléter le futur Eco-label pour les produits d’investissements verts.

Elle prévoit également d’achever l’Union des marchés de capitaux, qui n’a jusque-là pas été un succès. Que pensez-vous de la création d’un fonds public-privé dédiés aux IPO des PME ? Avez-vous d’autres propositions ?

Le renforcement des marchés de capitaux à 27 au profit des entreprises et des épargnants constitue un enjeu de première importance. 2019 a vu l’accentuation de deux tendances majeures : financement par la dette et financement par le private equity au détriment du recours aux émissions d’actions en Bourse. Il faut rééquilibrer les sources de financement et il faut le rééquilibrer à l’échelle de l’Union ; les fonds public-privés peuvent jouer un rôle – je les vois plutôt comme intervenant avant les IPO et les préparant – mais à l’évidence nous avons besoin d’un ensemble de mesures pour réduire le coût d’une cotation et des transactions et assurer un suivi des valeurs par une recherche de qualité. Un encrage clair et convainquant dans une démarche de développement durable est également susceptible d’attirer les investisseurs.

Propos recueillis par Olivia Vignaud

Nouvelle Commission européenne : les attentes des régulateurs (1/2)

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