Combattre la dette mais, en même temps, revenir sur des économies du gouvernement précédent. Remettre en chantier la réforme des retraites sans modifier "l’équilibre financier". Débureaucratiser sans expliquer comment. Contrôler l'immigration sans propositions concrètes. Dans son discours de politique générale, François Bayrou a cherché à satisfaire tout le monde. Au risque de fâcher tous les partis ?

C’est connu, François Bayrou tient à écrire lui-même ses discours. Celui de politique générale prononcé le 14 janvier à l’Assemblée nationale était un défi difficile puisqu’il devait éviter la censure et contenter (ou du moins obtenir la neutralité) de toutes les forces politiques. Finalement, le successeur de Michel Barnier a ménagé la chèvre et le chou. Florilège des points saillants de sa prise de parole.

Une réforme des retraites "remise en chantier"

La position du gouvernement Bayrou sur la réforme Borne était attendue tant par le PS qui espérait un recul (pour ne pas censurer) que par les macronistes qui ne souhaitaient pas revenir sur une réforme emblématique. Pris en sandwich, l’hôte de Matignon a soufflé le chaud et le froid. Il a promis de "remettre la réforme en chantier" sans s’engager sur des mesures concrètes et en gardant à l’esprit "l’équilibre financier". Il a longuement insisté sur l’importance du dialogue social. Reste à savoir si cette réponse de Normand ne risque pas de mécontenter tout le monde.

Maîtriser la dette publique

Chat échaudé craint l’eau froide. Sous Bruno Le Maire, la croissance avait été surestimée. Le gouvernement revoit les prévisions de croissance à la baisse pour 2025, en passant de 1,1% à 0,9%. Si le gouvernement souhaite un déficit public de 3% en 2029, aucune mesure concrète n’a été annoncée, hormis une vague "réforme de l’action publique".

Dette : "Tous les partis de gouvernement ont une responsabilité"

Pourtant, la réduction de la dette semble une priorité pour François Bayrou qui, depuis des années, en fait son principal cheval de bataille. "La France, dans son histoire, n’a jamais été aussi endettée qu’aujourd’hui", a-t-il asséné en préambule de son discours. Déplorant une "épée de Damoclès au-dessus de notre pays et de notre modèle social", il a souligné que "tous les partis de gouvernement ont une responsabilité (…) il y’en a pour tout le monde". "Mais ce n’est pas un acte d’accusation", a-t-il pris le soin de préciser.

Moins d’économies demandées aux collectivités territoriales

Il y a le discours et il y a les actes. Malgré sa tirade sur la dette, François Bayrou a atténué l’effort demandé aux collectivités territoriales dans le budget 2025. Michel Barnier prévoyait 5 milliards d’euros d’économies, son successeur 2,2 milliards.

Abandon du déremboursement de médicaments et de consultations

De même, le gouvernement a annoncé l’abandon de "la mesure de déremboursement de certains médicaments et de consultations" prévue dans le budget du précédent gouvernement Barnier. 

Combattre la bureaucratie, le retour du serpent de mer

À leur arrivée à Matignon, tous les Premiers ministres ressortent un grand classique : combattre la bureaucratie. François Bayrou ne fait pas exception à la règle. Il veut faire adopter un projet de loi de simplification économique, "rapidement" afin de lancer "un puissant mouvement de débureaucratisation", qui escompte "rendre du pouvoir au terrain pour identifier des potentiels simplifications, suppressions ou allègements d’obligations utiles".

Régalien : de la fermeté ?

Le régalien est vu comme un angle mort de la macronie, le RN prospère, Bruno Retailleau et Gérald Darmanin sont les ministres les plus appréciés du gouvernement. Dans son discours de politique générale, François Bayrou a tenu à faire preuve de fermeté : "L’immigration est d’abord une question de proportion" a-t-il affirmé sans pour autant préciser comment s’il voulait réduire ladite proportion. Seule piste évoquée un comité interministériel de lutte contre l'immigration.

Sur l’insécurité, il a tenu compte d’un "dysfonctionnement" récurrent dans les gouvernements. Traditionnellement, le ministre de la Justice joue le "good cop", le ministre de l’Intérieur le "bad cop". Cette fois-ci, Beauvau et la Place Vendôme semblent sur la même longueur d’onde. "J’ai souhaité une coopération étroite entre les ministères de la justice et de l’intérieur, pour leur confier la restauration de l’autorité de l’État", a fait valoir le patron du Modem, qui note que "les questions de sécurité sont brûlantes pour nos concitoyens".

Lucas Jakubowicz

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