Aux yeux de Matias Möttölä 2018 aura été une année décevante mais pas désastreuse pour les fonds long/short Actions Europe. En moyenne, ils ont perdu 7,4 %, contre 10.6 % pour le MSCI Europe. L’Associate Director chez Morningstar nous explique pourquoi ces fonds n’ont pas eu les résultats espérés et nous dévoile leurs perspectives.

Décideurs. Pourquoi les fonds long/short actions ont déçu en 2018 ?

Matias Möttölä. Si leur perte est ici supérieure à leur promesse de départ, ils ont cependant fait mieux que le marché. Plusieurs raisons expliquent cette déception. D’une part, les mauvaises performances des titres dits « value », très présents dans les fonds long/short. Depuis plusieurs années, ces valeurs sous-performent celles des entreprises dites de « croissance ». D’autre part, en 2018, le regain de volatilité provoqué par des craintes macroéconomiques fut très soudain et violent. Les gérants long/short en ont subi les conséquences, surtout lors du quatrième trimestre.

Sur le long terme, ces fonds ont l’objectif de prendre 50 % de la hausse et environ 35 % de la baisse. Ont-ils tenu leur promesse ?

Oui, ils ont en moyenne réussi à capter entre 40 % et 60 % de la hausse, même si on constate une forte hétérogénéité entre les fonds. Certains n’hésitent pas à prendre beaucoup de risques. Les fonds market neutral vont, quant à eux, perdre un peu moins lors des phases de baisse du marché. Plus globalement, depuis trois à cinq ans, les fonds long/short n’ont toutefois pas eu les résultats espérés. Deux éléments peuvent l’expliquer : la sous-performance du style value, comme nous l’avions souligné précédemment, et la faiblesse des taux d’intérêt. Les fonds long/short étant en partie investis en monétaire et en liquidité.

Les différences de performances entre les fonds long/short actions européennes et les fonds long/short actions internationales sont-elles significatives ?

Leur profil est en réalité assez proche si l’on prend en compte le contexte de leurs marchés (beta vs Europe & beta vs global). On peut atteindre avec les fonds long/short Europe un bêta équivalent à ceux des fonds internationaux, avec un gain situé entre 40 % à 60 % de la performance du marché des actions. Certes, l’univers du gérant est beaucoup plus large sur un fonds long/short international mais le risque sur les devises (surtout le dollar) peut poser des difficultés. Il est très cher de couvrir le risque dollar. Cette couverture peut, en effet, coûter entre deux et trois points de performance aux gérants européens.

"Les titres dits « value » sont très présents dans les fonds Long/short"

Qu’en est-il des fonds market neutral face aux fonds directionnels, notamment dans des périodes de baisse des marchés ?

Les résultats ont été décevants. Les fonds market neutral essayent d’avoir une corrélation proche de zéro, voire négative, avec le marché. Cela les a aidés en 2018, mais pas totalement sauvés. Les parts libellées en euro des fonds market neutral – action ont eu une perte d’environ 4 % en moyenne. Ils ont donc fait mieux que les fonds long/short directionnels. Plus globalement, le style relative value (dont les fonds market neutral fait une partie) n’a pas fonctionné, surtout en 2018. De toute manière, il n’y a pas eu grand-chose qui a réussi dans l’univers de la gestion d’actifs, mis à part les US Treasury.

Et face aux fonds diversifiés, les fonds long/short ont-ils leur mot à dire ?

Lors des phases de baisse, les fonds long/short vont perdre un peu moins que les actions, mais vont tout de même perdre un peu. Les fonds diversifiés ont davantage de possibilités mais si l’on parle de fonds d’allocation diversifiés flexibles, la majeure partie du risque vient du marché actions. Il y a également les fonds alternatifs – multistratégies tels qu’Aberdeen Standard Investments Global Absolute Return Strategies ou Invesco Global Targeted Returns Fund, dont l’exposition au risque actions est modeste, même potentiellement négative dans une partie de marché comme actions européennes, par exemple. Ces derniers sont, en effet, en mesure de « shorter » les actions ou les taux d’intérêt. Ces types de fonds proposent donc peu de corrélations avec les marchés actions.

Le contexte de marchés (valorisations élevées, taux bas…) est-il aujourd’hui favorable aux fonds long/short actions ?

Il n’a jusqu’ici pas été favorable. La sous-performance des titres value face aux valeurs de croissance est une raison. Celle-ci est très populaire auprès des gérants de fonds long/short. Les taux d’intérêt très bas en est une autre. La partie des actifs placés en liquidité coûte ainsi de l’argent au gérant. Le problème est que ces deux facteurs de difficultés peuvent durer. Ce n’est clairement pas une bonne nouvelle pour les gérants de fonds long/short.

Propos recueillis par Aurélien Florin

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail