Entretien avec Thierry Flahault, Associé co-fondateur de Flint Business Consulting
Anciennement chez Andersen Business Consulting et BearingPoint, Thierry Flahault a créé Flint Business Consulting fin 2007 à New-York. Il nous donne le point de vue de l’entrepreneur sur la conquête du marché américain et envisage l’avenir du conseil.
Décideurs : Comment prend-on la décision de quitter un poste de directeur associé dans une grosse structure de conseil et de repartir à zéro ?
Thierry Flahault : C’est le genre de décisions que l’on prend quand on sent que le frisson disparaît dans un poste trop établi. C’est avant tout un état d’esprit. S’il y a une chose qui me déplait dans le conseil tel qu’il est souvent pratiqué aujourd’hui, c’est la pression du groupe : il faut placer chez les clients des « jeunes » alors qu’ils ont avant tout besoin de séniorité et d’expérience.
Décideurs : Quelles difficultés avez-vous rencontrées sur le chemin de la création d’entreprise aux Etats-Unis ?
T. F. : Nous n’avons clairement pas croqué la pomme au bon moment. En décembre 2007, au moment où les Etats-Unis ont été frappés par la crise, nous lancions Flint Business Consulting. Et notre business plan allait malheureusement à l’encontre des contingences de marché : le conseil auprès des institutions financières s’effondrait à New-York. Est-ce dire que la réussite est une affaire de timing et de positionnement ? Ce sont en effet deux déterminants forts du succès. Nous avons élargi notre offre de services et n’hésitons pas à rechercher des clients même jusqu’en Asie. Etre entrepreneur, c’est savoir faire le dos rond et saisir les opportunités. De gros dossiers comme le rachat de Vedior par Randstad nous ont été confiés en 2008. Après la tempête, quand le marché va reprendre, nous serons bien enracinés. Si les deux premières années ont été difficiles, je retiens un élément très positif de notre implantation aux Etats-Unis : les sociétés américaines recherchent avant tout les compétences et les qualités humaines du consultant; ils font moins attention à la marque. Les petites structures ont ainsi toutes leur chance, sans que la culture du nom ne les pénalise.
Décideurs : Quelles sont les grandes tendances du marché du conseil aux Etats-Unis ?
T. F. : Je pense qu’on assiste à la fin d’un modèle. Les grandes structures souffrent. BearingPoint USA est ainsi passé en chapter 11 en 2009. Les Etats-Unis, société de la surenchère du conseil, reconsidèrent leurs fondamentaux. Le conseil tous azimuts, assénés par des jeunes sans grande expérience, ne convient plus. Les entrepreneurs américains veulent du conseil sur mesure, très expérimenté. Les européens connaitront cette saturation dans quelque temps. L’ère de la niche a déjà commencé aux Etats-Unis.
Décideurs : Flint Business Consulting dans dix ans, c’est quoi ?
T. F. : Flint Business Consulting restera à taille humaine. Ce seront tous des consultants très expérimentés ; des français, certainement, car les consultants français ont, selon moi, un sens unique du travail de qualité et du respect du client, mais aussi des américains car ils sont essentiels pour le ‘networking’, doublement important aux Etats-Unis et en période de tension sociale. Ce que je souhaite, c’est que nous soyons tous associés ! Ce seront des experts dans leur domaine (pricing, CRM,…) qui auront, comme moi, l’envie d’entreprendre, le sens du contact et la passion du conseil.