Trois questions à Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes « L’âge n’a jamais été, et ne sera jamais une condition pour comprendre les enjeux du monde contemporain »
Décideurs. Vous êtes une femme et vous êtes jeune, deux caractéristiques relativement rares en politique. Est-ce un avantage ou un inconvénient ?

Najat Vallaud-Belkacem.
Je n’ai jamais appréhendé les choses en ces termes. Il est vrai que la faible représentation des femmes de ma génération dans la vie politique constitue objectivement un obstacle pour d’autres de s’engager, puis d’être élue et d’accéder aux responsabilités. Un obstacle qu’il faut lever, et je m’y emploie plus que jamais aujourd’hui en tant que ministre des Droits des femmes. Dans le même temps, je constate aussi une très forte aspiration des Français à être mieux représentés, à travers des assemblées et des visages qui leur ressemblent davantage. Mais attention aux ambiguïtés qui ouvrent la porte aux faux procès : être une femme, ou faire partie de telle ou telle génération ne sont pas des qualités, des mérites ou des compétences en tant que telles et qu’il faudrait faire valoir. C’est pour cela que le principe d’un égal accès de tous les citoyens à la vie publique est le seul qui compte, comme l’a rappelé la commission Jospin pour la rénovation de la vie politique. Ses propositions trouveront d’ailleurs une application législative dans les prochains mois, notamment pour susciter un renouvellement de générations.

Décideurs. Dans le monde de l'entreprise, les "juniors" sont recherchés car ils sont généralement plus entreprenants et plus réactifs que leurs aînés, mais aussi plus flexibles et plus corvéables. Qu'en est-il en politique ?

N. V.-B.
Je crois, encore une fois, que c’est une erreur de voir les individus et ce qu’ils peuvent apporter à une organisation collective de cette manière. Je connais trop d’exemples qui invalident de telles généralités. Les jeunes ont suffisamment d’atouts à faire valoir, que ce soit dans l’entreprise ou en politique, pour ne pas mettre en avant des « avantages compétitifs » qui disqualifieraient les générations précédentes. Pour n’en citer qu’un seul, il est évident que leurs formations, par définition récentes et souvent avec une expérience internationale, peuvent apporter beaucoup à une entreprise qui doit innover pour se développer. En politique, je dirais simplement qu’ils ont sans doute la vertu d’être en phase plus facilement avec les questions nouvelles mais l’âge n’a jamais été, et ne sera jamais une condition pour comprendre les enjeux du monde contemporain. Dans la République, un élu est le représentant de toutes et de tous, pas d’une catégorie de la population : ce qui est important, c’est de restaurer le lien de confiance et de proximité qui s’est rompu entre les élus et les citoyens. Cela passe par une plus grande représentativité de la classe politique, et donc des élus plus jeunes.

Décideurs. Vous avez longtemps marché dans les pas de Ségolène Royal. Réaliser un tel parcours aurait-il pu être possible sans elle ?

N. V.-B.
J’ai bien sûr beaucoup appris à ses côtés, et la confiance qu’elle m’a accordée lorsqu’elle m’a notamment demandé d’être sa porte-parole de candidate à l’élection présidentielle en 2007, a beaucoup compté dans mon parcours. Sa combattivité, la force et la sincérité de ses convictions, sa stature de femme d’État sont des exemples. Je reste très attachée aux liens noués avec les responsables politiques qui m’ont incitée à me présenter devant les électeurs et qui m’ont confié des responsabilités locales importantes : Gérard Collomb ou Jean-Jack Queyranne, par exemple.

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail