Trois questions à Nathalie Kosciusko-Morizet, porte-parole de la campagne de Nicolas Sarkozy (UMP) pour l'élection présidentielle, depuis le point presse le 29 février.
Que vous inspirent les mesures fiscales proposées par le candidat François Hollande ?

Nathalie Kosciusko-Morizet.
La dérive fiscale est d’actualité dans cette campagne. La philosophie du programme de François Hollande telle qu’elle ressort est celle d’une addiction à l’impôt. Et quand on est addict, on a besoin de sa dose, chaque jour plus importante.
François Hollande a proposé la taxation à 75 % des revenus d’abord de plus d’un million par mois, puis d’un million par an, puis au-delà d’un million par an. C’est plus que ce qu’avait fait Pierre Mauroy du temps des communistes au gouvernement, où il avait fait passer le tout de 60 % à 65 %. L’annonce a été saluée par l’extrême gauche allemande, c’est déjà un soutien ! Nulle part ailleurs il n’existe de taux pareils.
Cette mesure est une provocation et un rideau de fumée qui doit masquer la vraie proposition de François Hollande qui est l’impôt pour tous. Il a annoncé 29 milliards d’impôts pour arriver à 3 % du déficit. C’est 20 milliards d’impôts pour financer des nouvelles mesures, plus 29 milliards pour arriver à ces 3 %. Au passage, comment fait-on pour trouver les 70 milliards restants pour revenir à l’équilibre des finances en 2016 ? Il manque toujours 70 milliards… Quand on décortique, on se rend compte qu’on prend 2,5 milliards d’euros sur la fiche de paie des salariés pour financer le retour en arrière sur la réforme des retraites et puis on met en avant des mesures plus modestes, comme celle, à 400 millions, déjà largement engagée, du taux marginal de la tranche sur l’impôt sur le revenu. François Hollande a inventé là le hold-up tranquille.
Du côté des salariés, François Hollande préconise une augmentation des cotisations sociales pour financer un retour en arrière sur les retraites : 2,5 milliards pour ceux qui ont travaillé dès 19 ans jusqu’à 60 ans. C’est une baisse de 250 euros sur la fiche de paie pour un couple qui gagnerait 1 600 euros chacun, soit le salaire médian. C’est beaucoup plus que la tranche à 75 % qui ne rapporterait rien, puisque tous les footballeurs sont partis ! Deuxième remise en cause, la détaxation des heures supplémentaires pour les entreprises de plus de dix salariés. Ce sont trois milliards d’euros dans la poche des salariés – 9 millions – qui bénéficient des heures supplémentaires. Troisième mesure, c’est la remise en cause de l’intéressement, de l’épargne salariale et de la participation pour cinq milliards d’euros. Enfin, la fusion à terme entre l’impôt sur le revenu et la CSG. Or, c’est une proposition qui sera défavorable à certaines catégories de la population, comme les retraités.
Pour les entreprises et, en particulier, pour les PME et les bas salaires, il y a des atteintes aux revenus des petits. L’augmentation des cotisations patronales est le pendant de l’augmentation des cotisations salariales. Ensuite, on a la suppression d’allégements de charge sur les bas salaires pour 2,3 milliards. Puis, la réforme de la suppression de la taxe professionnelle à un milliard d’euros, qui a bénéficié à 80 % à des PME, notamment dans l’industrie. On taxe ainsi l’investissement. Enfin, le durcissement du régime fiscal sur les emplois à domicile qui touche deux millions salariés.
Le programme socialiste annonce des choses belles et agréables à l’oreille, mais à côté de cela il y a surtout des augmentations du coût du travail et de l’investissement, qui toucheront toutes les entreprises, qu’elles fassent ou non des bénéfices.


Quelles sont les réponses de Nicolas Sarkozy ?

Nathalie Kosciusko-Morizet.
Elles sont très claires. La première mesure est la baisse du coût du travail. Dans l’industrie et dans les PME, c’est un montant de 13,2 milliards qui concerne les charges patronales et familiales pour réduire le coût du travail, jusqu’à 5,4 % pour les plus bas salaires. Cela concernera plus de 14 millions de salariés. Les PME sont particulièrement bénéficiaires. Ces 13,2 milliards sont financés de la manière suivante : 10,6 milliards par une hausse du taux le plus élevé de TVA et pour une autre partie, 2,6 milliards, par une baisse de la fiscalité sur les revenus financiers.
La deuxième mesure est l’augmentation de la fiche de paie pour les bas salaires. Ce sont 4 milliards d’euros mis sur la table. C’est donc plus que la prime pour l’emploi. Cette mesure ne pèse en rien sur les entreprises ou les déficits budgétaires, puisque l’argent additionnel va être cherché dans le durcissement de la fiscalité sur les dividendes. On donne plus et on donne à temps. Et ce sont les mêmes Français qui étaient concernés par la prime pour l’emploi qui seront concernés par la baisse des cotisations salariales.
Troisième proposition : celle qui concerne les enseignants du collège et du lycée qui accepteraient de passer de 18 heures à 26 heures dans l’établissement et qui verraient leur salaire augmenter de 25 %. Soit 500 euros net par mois en plus pour un salaire ordinaire de collège ou lycée.

Pour un retour à l’équilibre, la formule de Nicolas Sarkozy est connue : il y a 115 milliards d’euros d’efforts à faire. Il manque 70 milliards à François Hollande. De notre côté, il y a 40 milliards de nouvelles recettes dont l’essentiel a déjà été voté d’ailleurs et il y a 75 milliards d’économies à faire via la réforme des retraites, la révision générale des politiques publiques, etc. Il nous faut trouver 8 milliards d’euros d’ici 2016.


Quelle enveloppe budgétaire représente d’ailleurs cette dernière mesure ?

Nathalie Kosciusko-Morizet.
En réalité, cette mesure ne coûte rien. Aujourd’hui, le non-remplacement d’un enseignant sur deux dans l’éducation nationale permet dans la moitié de son économie d’être redistribuée en pouvoir d’achat pour les enseignants. Désormais, on arrête la suppression d’ un poste sur deux dans la maternelle et dans le primaire et on la maintient au collège et au lycée. Ainsi, on ne redistribue plus le gain économisé à la moitié, mais à l’ensemble. Et cela permet de financer la mesure. On atteint l’équilibre dès 40 000 postes, mais cela reste sur la base du volontariat pour les enseignants entrants ou en poste.

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