Mayer Brown : « Le monde des affaires en Afrique va continuer à se sophistiquer »
DÉCIDEURS. Quelle est la stratégie de Mayer Brown en Afrique ?
Matthieu de Varax. Aujourd’hui, nos clients ne cherchent plus seulement un cabinet avec une practice africaine globale : chaque pays africain a ses particularités né- cessitant une expertise spécifique. Si notre présence sur le continent est ancienne et couvre toutes les régions, nos bureaux au Brésil et au Maroc nous permettent d’avoir un réel ancrage en Afrique lusophone et du Nord. L’année 2016 marque à ce titre un réel tournant avec l’arrivée d’Olivier Mélédo qui consolide l’accélération de notre focus sur l’Afrique et la formation d’une véritable équipe transverse.
La force de frappe de Mayer Brown ré- side dans notre faculté à mettre en place les bonnes équipes au bon moment et de proposer à nos clients une offre complète. Nos secteurs d’intervention sont variés: nous sommes intervenus comme conseil d’une société chinoise dans le cadre d’un litige dans le domaine minier au Zimbabwe, à l’occasion d’une joint-venture en Mauritanie, en financement d’un projet minier au Sénégal ou encore comme conseil d’un fonds de private equity amé- ricain dans un projet brownfield portant sur l’acquisition de trois centrales thermiques en Afrique francophone et anglophone ; sans oublier de nombreux développeurs de projets d’énergie renouvelable en cours au Cameroun, Togo, Mali, Guinée, Kenya et Maroc.
Dany Khayat. Nous sommes aussi très actifs en arbitrage et nos équipes se sont fortement renforcées ces dernières années. Nous couvrons tout le continent et intervenons souvent dans des litiges relatifs à l’exécution de grands contrats de construction type « Fidic ». Avec Olivier Mélédo, nous travaillons en synergie sur les dossiers énergie et infrastructures. Nous représentons le gouvernement égyptien dans un arbitrage Cirdi dans le secteur de la gestion de l’eau, une société irlandaise dans le domaine des services en Libye ou encore le gouvernement gambien dans le cadre d’un arbitrage Cirdi relatif à une vente d’actifs pétroliers.
Vers quels secteurs souhaitez-vous faire évoluer votre activité ?
M. de V. Ce sont nos clients qui nous guident vers des spécialisations. Le monde des affaires en Afrique va continuer à se sophistiquer. Beaucoup de cabinets ont longtemps pratiqué un droit généraliste des affaires, mais leurs activités ne seront plus pérennes s’ils ne tendent pas à ajouter d’autres compétences et à se spécialiser. C’est une stratégie que nous avons poursuivie très tôt. Notre expertise en droit Ohada nous permet de conseiller nos clients sur toute une panoplie de sujets tels que la réglementation des changes, en financement d’équipements ou encore en acquisition corporate.
Quelles évolutions observez-vous dans le monde des affaires en Afrique?
Olivier Mélédo. Nous assistons à l’émergence de nouveaux acteurs. Les fonds de private equity remplacent certains acteurs historiques, notamment dans les secteurs de l’énergie et du pétrole où ils reprennent des participations majoritaires. Il s’agit de nouveaux clients que nous devons conseiller efficacement, et cela impose d’avoir des connaissances techniques propres à cette typologie d’acteurs.
Alban Dorin. Nous constatons aussi l’apparition de puissants acteurs locaux. Des fonds d’investissement panafricains qui évincent des fonds européens grâce à leur flexibilité et leur connaissance du marché local. Des banques africaines commencent aussi à financer de gros projets sur le continent et à structurer leur croissance dans d’autres pays et plus particulièrement en Afrique francophone.
O. M. Enfin, nous voyons se multiplier des associations de cabinets d’avocats panafricains offrant un travail de qualité à prix compétitif et commençant à avoir accès à des opérations auxquelles ils n’avaient pas accès auparavant. Il s’agit généralement d’avocats issus de la diaspora, formés à l’étranger et qui retournent en Afrique car ils y perçoivent de réelles opportunités professionnelles.
Comment collaborez-vous avec Afrique Advisors, votre partenaire privilégié au Maroc ?
M. de V. Notre partenaire à Casablanca représente un « footprint » de Mayer Brown sur le continent. Le Maroc, avec notamment Casablanca Finance City, est véritablement un hub pour tout investisseur souhaitant s’installer en Afrique subsaharienne. Avec Laila Slassi qui dirige le bureau marocain, nous n’accompagnons pas seulement des investisseurs étrangers mais de plus en plus d’entrepreneurs marocains qui, dans le sillage de la politique économique marocaine actuelle, se tournent davantage vers cette région. Il existe aussi une réelle synergie entre notre bureau de Casablanca et le bureau de Dubaï, ouvert en novembre 2016. Cette ré- cente ouverture attire une clientèle d’investisseurs locaux comme étrangers installés aux Émirats. C’est le cas d’un client indien qui investit par exemple beaucoup dans le secteur minier. Nous n’excluons pas d’ouvrir un bureau en Afrique subsaharienne. Il s’agit néanmoins d’un marché du droit plus difficilement pénétrable, les avocats africains adoptant généralement une attitude plus protectrice, mais nous portons beaucoup d’attention aux ouvertures de cabinets, comme à Abidjan ou à Accra.