Tout chef d’entreprise rêve de savoir si ses salariés sont réellement impliqués et s’ils adhèrent à sa stratégie. Comment le mesurer et jusqu’où aller dans l’utilisation des résultats ? Éléments de réponse.

A l’heure des grandes transformations, de la mondialisation et de la quatrième révolution industrielle, les dirigeants ont compris que le capital humain était stratégique. Désireux de savoir si leurs salariés sont investis, et conscients que le taux de turnover et la croissance du chiffre d’affaires ne suffisent pas à les éclairer sur ce point, ils cherchent à mesurer de façon objective cette attitude purement subjective qu’on appelle « l’engagement » des collaborateurs pour en faire un véritable outil de pilotage de l’entreprise.

Études, sondages et baromètres

Pour répondre à ce besoin, nombreux sont les cabinets de conseil en ressources humaines qui développent des dispositifs d’évaluation. Ils se fondent sur une série d’indicateurs clés ­définis avec la direction de l’entreprise. Chez le ­spécialiste du mobilier de bureau Manutan, un baromètre baptisé « With love with employees » est réalisé chaque année. Un ­questionnaire est adressé à l’ensemble des ­salariés, qui y répondent ­massivement, le taux de ­participation étant de 88 %. Au sein de la Française des jeux, les salariés sont invités tous les six mois à répondre à une enquête, le « FDJ Scope ». Les conseils en RH complètent les résultats du sondage réalisé par une étude comparative des scores atteints dans d’autres groupes de même taille ou évoluant sur le même marché. L’analyse est précieuse, car un décalage important est souvent synonyme de baisse de compétitivité.

Personnaliser l’approche

Certaines entreprises créent leurs propres indicateurs afin de les adapter à la culture du groupe et à ses enjeux prioritaires. Chez Invivo, premier groupe coopératif agricole français engagé dans un vaste mouvement d’accélération digitale, l’engagement des salariés est évalué au vu de leur activité sur les réseaux sociaux. « "Poster" des informations sur son groupe et ses projets témoigne d’un engagement et constitue un bon indicateur du climat social », souligne Sébastien Graff, directeur des ressources humaines du groupe. Car, explique-t-il, « sur les réseaux externes, on partage une conviction ». Le baromètre reflète également le niveau de « digitalisation » des collaborateurs, essentiel à la transformation numérique de l’entreprise.

évaluer les managers ?

Le taux d’engagement des collaborateurs constitue un outil de pilotage à part entière. C’est le cas à la Française des jeux, où il est analysé à la loupe lors des réunions du comité exécutif. De même du côté de Manutan. Édouard Michel, DRH Groupe, explique que le baromètre annuel n’est pas conçu « comme un outil d’évaluation des managers mais comme un outil de mesure de la satisfaction des collaborateurs ». Il permet néanmoins « d’identifier les entités au sein desquelles il est nécessaire de développer un plan d’actions ­spécifiques, notamment sur les modes de management », précise-t-il. S’agit-il donc uniquement de s’informer, de prendre la température, ou peut-on aller plus loin et en faire un mode d’évaluation des managers ? Le sujet est ­épineux, le risque étant de détourner l’outil de son usage premier. S’ils perçoivent le sondage comme une méthode d’évaluation du management, les salariés pourraient être amenés à modifier leurs réponses, ce qui aurait pour effet de ­fausser les résultats de l’étude et de remettre en cause sa vocation première : mesurer l’engagement des collaborateurs.

Marie-Hélène Brissot

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