Carrefour-Casino : la peur du boursicoteur

Pour Casino et son président Jean-Charles Naouri, il faut se méfier des marchés financiers et des « boursicoteurs » qui l’animent. Par le passé, le propriétaire des magasins Monoprix (la chaîne la plus rentable du groupe) n’a pas été épargné par les mouvements baissiers en Bourse : en 2015, le hedge fund Muddy Waters déclenche une turbulence boursière en pointant du doigt la charge de la dette de Casino et, l’été dernier, des spéculations boursières font encore plonger sa valeur… D’ordinaire, Casino maintient donc un niveau de vigilance maximal lorsqu’il s’agit de communiquer. Et ce statut passe nécessairement au rang supérieur quand il est fait cas de ramifications stratégiques avec le numéro un français de la grande distribution, Carrefour.

Casino accuse, Carrefour nie

C’est par un communiqué ferme et explicite que Casino a expliqué qu’il avait été approché par Carrefour mais qu’il ne souhaitait pas donner suite à ses avances. Quelle surprise ! Rien d’officiel n’avait fuité dans la presse  ̶  c’est pourtant souvent le cas lors de pourparlers de cette ampleur  ̶  et rien n’obligeait la direction de Casino à rendre public le sujet d'une réunion qui aurait eu lieu dans le plus grand des secrets entre M. Naouri et son homologue de Carrefour, Alexandre Bompard. Tout cela sous la bienveillance d’Alain Minc, le conseiller privilégié des groupes du Cac 40. La réaction de Carrefour ne s’est pas fait attendre. Le géant aux près de 90 milliards d’euros de revenus en 2017 a nié et renvoyé son concurrent dans les cordes, expliquant que les difficultés rencontrées par Casino et son actionnaire de contrôle, Rallye, ne pouvaient « justifier des communications intempestives, trompeuses, et dénuées de tout fondement ». Ambiance ! Si la théorie selon laquelle Casino aurait orchestré un coup marketing pour faire remonter son cours de bourse paraît un peu farfelue, on peut sans doute s’accorder sur le fait que l’enseigne a pris peur. Peur de la fuite d’informations sur ses activités, peur d’un raid hostile de Carrefour après coup, peur de nouvelles vagues de trading sur son cours ? Il semble que cela soit un peu de tout ça.              

Firmin Sylla