Le private equity connaît une croissance insolente. Le président du directoire d'Eurazeo PME revient sur les raisons du succès.

Décideurs : Comment se porte le marché du capital-investissement en France ?

Olivier Millet : Les derniers chiffres publiés par France Invest sont très intéressants. Le private equity est durablement en croissance. La classe d’actifs, l’investissement dans les sociétés non-cotées, est devenue tellement grande que l’on pouvait se demander si elle allait continuer à croître. La réponse est positive. Les entreprises ont des besoins de financements non couverts et les investisseurs ont des liquidités à déployer. Par ailleurs, le relais naturel du financement des groupes privés en Bourse se limite aujourd’hui davantage aux grosses capitalisations. De plus en plus de transactions entrent donc dans la sphère du « non-côté » alors qu’elles pouvaient par le passé correspondre à une cotation sur un marché financier.

La Bourse a ainsi perdu du terrain sur le non-coté ?

Il faut rester prudent. La Bourse demeurera le principal pourvoyeur de capitaux. Mais il y a clairement eu un rééquilibrage des forces. Si le private equity passe de 2% à 4%, ou de 4% à 6% des capitaux levés dans le monde, c’est déjà bien.

En France, relevons tout de même un fait de marché important. Cet été Delachaux a préféré le private equity à l’introduction en Bourse même si les conditions de cotation étaient satisfaisantes. Il s’agit d’une opération d’environ 1,5 milliard d’euros de valeur d’entreprise.

L’existence d’un vrai marché secondaire est-elle pour beaucoup dans la dynamique du private equity ?

En quelque sorte, les entreprises se cotent sur le non-coté. Cela peut paraître antinomique, mais c’est pourtant le cas. Elles rentrent sur ce marché en ouvrant une première fois leur capital et ne vont pas verrouiller le tour de table ad vitam aeternam. Si l’on prend l’exemple d’une start-up, elle lève des montants de plus en plus significatifs au cours de sa croissance. Et à chaque étape, de nouveaux projets et investisseurs sont annoncés. C’est de l’information, et donc un début de cotation.

L’intérêt que les financiers portent aux entreprises leur donne de la valeur. Si Indivest décide de participer au tour de table d’une pépite tech, c’est un message, une information de marché. Historiquement, il existait trois formes d’actionnariat stable : l’actionnariat d’Etat, l’actionnariat familial et l’actionnariat boursier. L’actionnariat des professionnels de l’investissement non coté était perçu comme instable en raison de la sortie pré-envisagée de ces acteurs. La fiabilité démontrée par le marché secondaire vient de mettre fin à cette critique.

Vincent Paes

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