L’univers de l’épargne et des services financiers ne saurait échapper au processus de digitalisation qui touche l’ensemble de l’économie. De ce nouveau paradigme, plusieurs fintechs sont en train d’émerger. Rencontre avec Laurent Girard, le cofondateur de l’une d’entre elles.

Décideurs. Pour sa première année d’existence, Yomoni a connu une croissance très rapide. Quelles sont vos priorités de développement pour les prochains mois ?

Laurent Girard. Notre première priorité est de convaincre de nouveaux clients de la pertinence de notre offre face au livret A et au fonds euro. Yomoni est une start-up et n'est pas encore rentable. Une société de gestion classique est rentable à partir de 200 à 300 millions d'euros d'encours. Notre ambition n'est pas de nous arrêter là mais de franchir le cap du milliard d'euros d'ici à 2020.  Nous avons construit la plateforme permettant d’acquérir et de gérer les clients. Notre croissance repose désormais sur l’amélioration de notre taux de transformation via la qualité de service, la pertinence de notre positionnement et la qualité de notre gestion. Tout ceci doit favoriser la recommandation et donc la viralité de notre offre. À court terme, notre objectif est de mettre en place un modèle d’acquisition digitale par la satisfaction client et que notre plateforme opérationnelle soit capable de supporter cette montée en charge. Le modèle économique prévois une arrivée à l’équilibre à moyen terme une fois la masse critique atteinte. Et si nous décidons d'attaquer le marché européen, cela repoussera d'autant cette échéance.

À l'avenir, nous ne fermons cependant pas la porte à l'entrée à notre capital d'investisseurs financiers 

 

Décideurs. Qu’en était-il de votre dernière levée de fonds ?

L. G. L'année dernière, nous avions concrétisé une levée de fonds de 3,5 millions d'euros auprès de Iéna Ventures, l’incubateur de La Financière de l’échiquier et de Crédit Mutuel Arkéa. Au-delà d’être des investisseurs, ces derniers sont surtout devenus des partenaires industriels de premier plan. Grâce à l'appui du premier, nous avons pu structurer et consolider la partie contrôle interne et contrôle des risques. Avec le second, nous avons notamment travaillé sur la signature électronique et le contrat d’assurance-vie. À l'avenir, nous ne fermons cependant pas la porte à l'entrée à notre capital d'investisseurs financiers tels que des fonds de private equity.

 

Décideurs. En quoi votre gestion est-elle innovante par rapport à ce qui se pratique sur le marché de la gestion d'actifs ?

L. G. Yomoni est le seul acteur français dont les principes de gestion reposent uniquement sur l'utilisation de fonds indiciels. Notre gestion est hybride reposant sur des modèles mathématiques éprouvés optimisant la diversification de nos portefeuilles et sur un comité de gestion expérimentée qui prend les décisions finales. Pour vous donner un ordre d’idée, sur les épargnants plaçant 1 000 euros, nous gagnons sept euros par an. Cette gestion privée est aussi innovante en matière de distribution puisque nous la réalisons nous-mêmes. En parallèle, nous sommes en train de réfléchir à créer des fonds ETF pour nous adresser à différents créneaux de distribution.

 

Décideurs. Quels sont les profils de vos clients ?

L. G. Les clients qui viennent le plus spontanément vers nous sont les épargnants de 45 à 55 ans représentant le deuxième décile de la population, c'est-à-dire les cadres disposant d'une expérience financière. Ceux-ci viennent chercher de la diversification et une solution sur mesure. Ils sont aussi déçus du service que leur banque leur propose. Cette clientèle, souvent en-dessous du seuil de 500 000 euros instauré par les banques privées, ne pouvait donc pas prétendre à un service véritablement dédié. Ils voient en Yomoni un système innovant avec des frais plus faibles et une performance potentiellement meilleure. Le second segment de notre clientèle est composé de trentenaires à fort potentiel. Ces derniers se posent déjà beaucoup de questions quant à la gestion de leur épargne mais ont peu de temps à y consacrer.

Les frais prélevés aux clients sont au maximum de 1,6 %

 

Décideurs. Quels sont les frais qui leur sont prélevés ?

L. G. La tarification est assez simple. Les frais prélevés aux clients sont au maximum de 1,6 %. Cela sans aucun frais d'entrée ni de sortie et quels que soit la somme investie. Nous avons mis à disposition un site internet permettant de comparer les tarifications pratiquées par les différents acteurs du marché (ING, Boursorama...). En fonction des profils, les frais évoluent dans une fourchette comprise entre 1,85 % et 3,3 %, soit le double de frais pratiqués chez Yomoni. Nous proposons à nos clients dix profils de risques. Sur le premier profil de risque, uniquement investi en fonds en euros, nous ne faisons payer que la partie revenant à l'assureur, c'est-à-dire 0,6 %.

 

Des acteurs comme Yomoni entrent-t-ils en concurrence avec les conseillers en gestion de patrimoine ?

Aujourd’hui les épargnants font appel à un CGPI lorsqu’ils ont un patrimoine important. Si l'une de ses prestations concerne la gestion de portefeuille, son champ d’action est en réalité beaucoup plus vaste. Il est capable d’accompagner ses clients sur des questions de fiscalité, de droit de la famille et de leur apporter une vision globale de leur patrimoine. Aujourd’hui nous nous focalisons sur la gestion d’épargne financière et l’allocation d’actifs. Nous sommes donc complémentaires avec l’offre des CGPI et souvent nous les précédons dans la vie de nos clients. 

 

Propos recueillis par Aurélien Florin (@FlorinAurelien)

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