Risqué mais rentable, le non coté séduit les investisseurs français. Également férus d’assurance-vie, ces derniers restent toutefois frileux devant la possibilité qui leur est offerte depuis la loi pour la croissance de 2015 : celle d’allier ces deux véhicules d’investissement.

Voilà maintenant deux ans qu’il est possible d’investir dans l’économie réelle grâce à l’assurance-vie. Une petite révolution menée par Emmanuel Macron lors de son mandat de ministre de l’Économie, concrétisée par la publication en août 2015 de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. « Il y a longtemps que nous avons le soutien des pouvoirs publics pour faire entrer le private equity dans les contrats d'assurance-vie », assure Renaud Dutreil, ancien ministre à l'origine du – célèbre – pacte Dutreil devenu gérant d'un fonds consacré aux savoir-faire d'excellence pour Mirabaud Asset Management. Si le produit n’a pas encore rencontré un grand succès, les assureurs et conseillers en gestion de patrimoine croient en son potentiel. Leurs principales raisons ? Le rendement du private equity, nettement supérieur à celui des actions, la faible volatilité de cet actif par définition décorrélé des marchés financiers ainsi que la volonté de diversification des détenteurs de contrats d’assurance-vie.

Démocratisation en marche

« L'avenir du private equity en France est d'être démocratisé », poursuit Renaud Dutreil. Jusqu’ici réservé à des patrimoines importants avec un ticket d’entrée d'environ 100 000 euros, le private equity devient beaucoup plus accessible par le biais de l’assurance-vie. Toutefois, la part de cette classe d’actifs reste limitée à 10 % du contrat. « Cette limite est sûrement liée à une méconnaissance du marché de la part des pouvoirs publics », analyse Daniel Collignon, directeur général de Spirica, filiale du Crédit agricole Assurances spécialisée dans la conception de contrats d'assurance-vie, qui croit toutefois en un relèvement de ce seuil dans les années à venir.

Illiquidité : un obstacle à contourner

Plusieurs freins de taille limitent encore la distribution à plus grande échelle de ce produit innovant, qu’ils soient réglementaires ou culturels. « La loi pour la croissance repose sur une erreur : imaginer que quelqu'un va investir dans le private equity via l'assurance-vie plutôt qu'un compte titres, plus avantageux fiscalement, sans contrepartie, assène Daniel Collignon. Cette contrepartie, c'est la liquidité. » Le dispositif Macron donne la faculté au souscripteur du contrat de déroger au code des assurances en permettant la remise de titres, notamment de parts de fonds communs de placement à risque (FCPR). Mais certains assureurs se sont engagés à aller plus loin et à racheter en cash les titres de FCPR correspondant à un retrait partiel ou total. Le risque est aussi un frein à la démocratisation de ce produit. Le private equity regroupe des activités très variées, du venture à l'entreprise familiale centenaire. Estimer le risque relatif à des modèles si différents requiert d’acquérir de nouvelles connaissances pour les intermédiaires de type CGP, mais aussi pour les investisseurs finaux qui veulent savoir où ils placent leur argent.

Choc culturel et vrai potentiel

La loi pour la croissance aura toutefois eu un impact culturel. « Les réflexes ne sont pas encore au rendez-vous, mais le dispositif commence à trouver un écho auprès du public qui voit la performance des fonds en euros continuer de baisser, observe Olivier Samain, directeur général d’Axa Thema. Il y a un vrai intérêt du client pour le non coté. » Et le potentiel est considérable : si les seuls contrats de plus de 150 000 euros étaient investis à 2 % sur le private equity, cela représenterait plus de treize milliards d’euros. Soit plus que la totalité des fonds injectés aujourd’hui dans le private equity français – en 2016, année record, 12,4 milliards d'euros ont été investis dans cette classe d’actifs.

@Camille Prigent

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