Branche de gestion d’actifs du groupe bancaire éponyme, BNY Mellon IM représente près de 1800 milliards de dollars d’actifs sous gestion, en faisant le cinquième acteur mondial. Le groupe adopte un modèle multi-boutique avec 8 sociétés de gestion détenues. Directrice en charge du marché français depuis la création du bureau de Paris en 2009, Anne-Laure Frischlander livre sa vision d’un secteur en pleine (r)évolution.

Décideurs. Comment avez-vous perçu les marchés sur l’année 2018 ?

Anne-Laure Frischlander. C’était une période assez intéressante. On a assisté à la fin du quantitave easing, sous fonds de   guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, des cycles économiques contrastés en Europe et aux USA en plus des mouvement exacerbés dans pays émergents du fait notamment d’un dollar (trop) fort. Ces trois forces ont influé sur les marchés. Celle qui faisait retenir leur souffle à la majorité des observateurs était le passage du quantitative easing au quantitative tightening, non pas tant par ce principe largement intégré par les marchés mais plus dans les anticipations de son ampleur. La fin du soutien des banques centrales a posé la question de savoir comment répondre aux autres chocs que l’on a pu observer comme cela a pu être le cas à l’été 2018 en Argentine ou en Turquie ou encore en automne avec l’inquiétude italienne et le retour du ralentissement économique. Sur les marchés européens, c’est inévitablement le Brexit qui sème le doute quant à sa mise en œuvre. Ensuite, l’inflation restera une variable clé à regarder quant aux futures marges de manœuvre des banques centrales Il faut apprendre à naviguer sans filet dans un cycle qui n’est pas encore arrivé à son point de rupture. Néanmoins, si l’on regarde le monde dans sa globalité nous ne sommes pas assis sur une crise systémique telle que par le passé En effet, le système monétaire est bien plus simple que par le passé et les liquidités sont plus importantes, ce qui n’est pas négligeable.

Comment voyez-vous le mouvement de consolidation actuelle du secteur ?

C’est un mouvement amorcé il y a quelques années et qui va se poursuivre. D’un côté, les géants vont inévitablement croître. De l’autre, les marges s’amenuisent. Mifid II a fortement impacté les coûts, et le volume est devenu plus important que la marge. L’environnement UCITS devient très complexe. Néanmoins, il ne faut pas tomber dans la course à la taille à tout prix, en travaillant très en dessous des marges.

Quelle importance ont pris les critères ESG ?

C’est tout simplement la nouvelle norme. Nous n’en parlerons plus dans quelques années tant il sera normal de les implémenter dans l’ensemble des solutions de l’entreprise. Les asset managers sont de plus en plus force de proposition dans ce domaine. Cependant, il convient de trier les acteurs qui ont mis en place une véritable stratégie ESG depuis plusieurs années de la simple démarche marketing. Cela a été le cas chez nous avec notre société de gestion Newton, pionnier en matière de gouvernance. On se rend compte que ces critères rentrent en ligne de compte autant que les données chiffrées dans le processus de sélection d’une valeur.

La gestion passive représente-t-elle une vraie concurrence pour BNY Mellon ? La gestion Passive peut bien entendu faire concurrence à notre gestion active dans une environnement où nous observons une pression sur les prix. Toutefois, nous en proposons également via notre affliléMellon. La course au niveau des frais oblige le gérant actif à démontrer sa valeur ajoutée face à la gestion indicielle. Il s’agit d’avantage d’un challenge que d’une véritable concurrence. On relèvera par ailleurs que ce phénomène est moins palpable sur le marché français que dans d’autres pays comme la région scandinave ou les Pays-Bas.

Quel segment de clientèle a été le plus porteur en 2018 ?

Les clientèles wholesale et institutionnelle représentent une importance égale, mais cette année le marché institutionnel a été plus porteur pour nous notamment par le fait que nous disposons d’une offre solide en matière de dette privée. Le wholesale a été impacté par un effet wait and see dû à la méforme des marchés notamment.

Propos recueillis par Yacine Kadri

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