Pour beaucoup, le rôle premier d’un CDO est d’alimenter la transformation de l’entreprise grâce à la donnée et l’IA. Pour Brice Miranda, CDO des laboratoires Servier, sa fonction ne se limite pas à des compétences techniques mais repose sur la bonne compréhension des enjeux métiers.

Décideurs. À partir de quel moment une société doit-elle se munir d’un CDO ?

Brice Miranda. Ma conviction profonde veut qu’aucune entreprise dans le monde d’aujourd’hui ne peut espérer rester dans la course sans enclencher une transformation digitale. Si l’on produit de la donnée – ce qui vaut pour toute société – il faut la gérer, et donc avoir recours à un Chief data officer. Cependant, la taille de l’entreprise doit être prise en compte. Pour une petite structure, il est possible de créer un poste transversal avec un profil également en charge de la direction des systèmes d’information par exemple.

Pouvez-vous présenter un cas d’usage de valorisation de la donnée dans votre entreprise ?

Afin de garantir les bienfaits d’un médicament, les chercheurs se doivent d’évaluer leurs cibles [élément de l’organisme qui assure la transmission du signal véhiculé par le médicament vers l'intérieur des cellules, ndlr] à partir de la littérature scientifique disponible. Une tâche longue et fastidieuse. Pour accélérer et faciliter le processus, nous avons développé un outil d’évaluation précoce des cibles. Ce portail digital en streamlit, sorte de bibliothèque open-source, a permis d’offrir de nombreuses données de scoring pour passer de trois heures de travail à une dizaine de minutes.

En tant que CDO, quelles difficultés et défis rencontrez-vous ?

Les difficultés du métier s’imposent comme des fiertés lorsqu’on les surmonte. Ces dernières années, les données et surtout l’IA ont redéfini notre façon de prendre des décisions. Autant de transformations des processus qui imposent une optimisation du "change management".

"En tant que CDO, il ne faut pas se limiter à délivrer des outils mais accompagner ces évolutions avec des formations et des parcours déclinés en fonction des experts"

En tant que CDO, il ne faut pas se limiter à délivrer des outils mais accompagner ces évolutions avec des formations et des parcours déclinés en fonction des experts. Enfin, une fine gestion des données demande d’investir du temps et de l’argent mais certaines contraintes opérationnelles constituent parfois des obstacles.

À partir de vos données valorisées, quels cas d’usages d’IA s’envisagent ?

Servier a fait le choix de prioriser deux axes de développement : démocratiser l’usage de la donnée en l’ouvrant à l’ensemble de l’entreprise et accélérer les projets d’IA. Le comex a ainsi validé soixante cas d’usage d’IA prioritaires à déployer dans les trois prochaines années. Accélérer la recherche de médicaments, mieux cibler les essais cliniques, réduire notre impact carbone, personnaliser les soins et les outils à destination des soignants, assurer une maintenance prédictive des outils… les perspectives sont multiples.

 Un chiffre clé qui illustre votre bonne valorisation de la donnée :

2000 – le nombre de visiteurs uniques des produits d’analyse de données et des tableaux de bord de Servier sur les 22 000 collaborateurs du groupe

 

 Propos recueillis par Léa Pierre-Joseph

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