En tant que concepteur de produits structurés, Lynceus Partners sert des conseillers financiers, gestionnaires d’actifs et des clients institutionnels dans le monde entier. Patrick Chotard, à la tête de la structure, et Romain Rivillon, directeur France, reviennent sur les spécificités de cette fintech en pleine croissance.

Décideurs. Historiquement positionné sur les produits structurés, vous avez développé d’autres classes d’actifs dont la dette privée. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Patrick Chotard. Lynceus Partners présente une expertise très forte sur les produits structurés. Nous avons constaté au fil du temps une appétence des investisseurs pour la dette privée, qui est peu ou prou un produit structuré où l’émetteur n’est pas traditionnel comme une banque. Dès lors, il s’agit d’une expertise connexe. Cette classe d’actifs reste proche de notre core business et représente une part croissante de notre activité. De plus, nous travaillons en BtoB au cœur de l’écosystème financier, ce qui nous permet d’être en contact avec les banques d’investissement et les family offices. De manière générale, l’attrait pour la dette privée s’est développé ces dernières années, que ça soit de la part de clients corporate ou d’investisseurs, nous amenant ainsi à développer davantage cette nouvelle activité.

Quel est votre rôle précis sur cette classe d’actifs ?

P. C. Nous distinguons trois segments au sein de la dette privée. Tout d’abord, le sourcing qui nous amène à identifier les sociétés souhaitant utiliser ce moyen de financement ; ensuite la structuration pouvant se référer à la rédaction légale ou à la titrisation ; et enfin la distribution permettant de trouver des investisseurs. Chaque mandat est unique. Selon chaque cas, nous intervenons sur un ou plusieurs segments. La dette privée fait appel à la même expertise qu’un produit structuré classique, mais son sourcing est plus complexe.

"Nous avons pris le parti de développer ce côté fintech, faisant de nous les pionniers en matière de service autour des produits structurés"

Intervenez-vous sur d’autres classes d’actifs ?

P. C. En effet, nous avons des demandes sur d’autres classes d’actifs. Celles-ci étant souvent éloignées de notre core business, nous privilégions notre réseau de partenaires afin d’aiguiller nos clients vers les meilleurs spécialistes. Les produits structurés et la dette privée sont assez similaires, que ça soit dans le mécanisme ou la conception, mais lorsque nous traitons des demandes s’éloignant de notre activité – l’art par exemple – nous faisons appel à nos partenaires spécialisés. À chacun son domaine d’expertise !

Pouvez-vous nous parler des spécificités de votre plateforme interne « Argo » ?

Romain Rivillon. Nous constatons depuis plusieurs années une réelle montée en puissance du digital en France et notamment des plateformes. À la création de Lynceus Partners, il y a quatre ans, nous avons pris le parti de développer ce côté fintech, faisant de nous les pionniers en matière de service autour des produits structurés. Dans le contexte actuel où les plateformes sont nombreuses, nous avons développé l’un des outils les plus complets du marché, permettant à tout acteur professionnel de produits structurés d’être présent sur le post-trade. Selon nous, il était nécessaire de proposer cet aspect innovant et disruptif pour devenir un acteur majeur. C’est dans cette optique que notre plateforme Argo est née, regroupant une vingtaine de fonctionnalités – automatisation des process, pilotage et analyse produits, pricing, reporting – et constituant un panel qui apporte un réel gain de temps et une forte valeur ajoutée à nos clients. Notre outil est en constante évolution, nous poursuivons son amélioration afin d’y ajouter régulièrement de nouvelles fonctionnalités.

"On constate une part croissante d’entreprises sensibilisées aux aspects ISR"

L’ISR et l’ESG sont au cœur des préoccupations, quelle est votre position sur ces sujets ?

P. C. Lynceus Partners applique une approche ESG, que ça soit en interne avec une gouvernance au quotidien ou sur les investissements. Concrètement, nous reversons à la fondation Hôpitaux de France une partie de notre chiffre d’affaires sur tous les produits commercialisés dans l’Hexagone. Également en partenariat avec Solactive, nous venons de lancer un indice ESG regroupant 30 valeurs en Europe qui contribuent le plus aux objectifs de développement durable (ODD). On constate une part croissante d’entreprises sensibilisées aux aspects ISR, avec des investisseurs finaux qui privilégient les investissements positifs. En dette privée, nous retrouvons également ce souhait d’impact investing, tel que le financement de projets en matière d’énergies renouvelables.

R. R. En tant que courtier indépendant, nous devons faire une analyse des nombreux indices thématiques afin de privilégier la performance. Par ailleurs, les émetteurs mettent en place de plus en plus de green bonds – obligations vertes – à travers les produits structurés européens et internationaux.

Quelles sont les tendances sur les produits structurés actuellement ?

P. C. Quand on conçoit un produit structuré, il faut avoir en tête que le client souhaite avant tout préserver son capital. Nous devons optimiser le rendement grâce à divers mécanismes, tout en minimisant le risque.

R. R. Gardons en tête l’adaptabilité des produits structurés en raison de leurs caractéristiques, permettant alors de nous adapter à tout type de marché. Depuis le début de l’année, le constat est unanime : les marchés sont très hauts, il est donc de notre rôle d’adapter ces produits à un profil plutôt défensif pour protéger les clients d’éventuelles baisses de marché. L’ingénierie financière et la sélection du sous-jacent d’un produit structuré n’ont jamais été aussi importantes qu’actuellement.

"En tant que courtier indépendant, nous devons faire une analyse des nombreux indices thématiques afin de privilégier la performance"

Quelle clientèle nourrit la majorité de vos volumes ?

R. R. Notre démarche en France s’est tout de suite adressée aux CGP et family offices. Nos volumes et le chiffre d’affaires sont, en premier lieu, venus de cette clientèle qui représente aujourd’hui 60 % de l’activité. Toutefois, cela tend à s’équilibrer avec les investisseurs institutionnels qui traitent des volumes plus importants malgré un nombre d’acteurs plus restreint que les CGP.

P. C. À l’étranger, nous développons un réseau de clients CGP et family offices, qui peut être parfois complété par une approche corporate, même si ces derniers ne sont pas toujours présents à l’international. La majorité du volume de notre chiffre d’affaires n’est donc pas générée par des institutionnels. L’essentiel est de s’adapter au marché dans lequel nous intervenons.

Quels sont vos projets à venir ?

R. R. Concernant la France, nous avons de grands projets. D’ici la fin de l’année, nous changeons de bureau car nous étoffons nos équipes, que ça soit sur la partie CGP ou la partie corporate. Nous poursuivons nos recrutements et nous continuons à développer notre plateforme Argo. Notre volonté est de garder une longueur d’avance grâce à la digitalisation.

P. C. Nous considérons chaque bureau à l’international comme une business unit indépendante et nous renforçons nos équipes pour nous tenir au plus près de nos clients. D’un point de vue plus général, Lynceus Partners souhaite élargir ses équipes de développeurs. Enfin, n’oublions pas que sans expertise humaine, le digital ne sert à rien.

Propos recueillis par Juliette Woods

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